Les élections européennes des 8 et 9 juin ont marqué une avancée significative de l’extrême droite au sein de l’Union européenne. Malgré une augmentation notable du nombre de sièges obtenus, ces partis se trouvent désormais divisés en trois groupes distincts, illustrant des fractures internes profondes.
Les Patriotes pour l’Europe : une nouvelle force contestée
Le groupe des Patriotes pour l’Europe, né des dernières élections, s’est rapidement imposé comme la troisième force du Parlement européen, rassemblant 84 eurodéputés. Sous la présidence de Jordan Bardella, chef du Rassemblement national (RN) français, ce groupe inclut des membres du Fidesz hongrois, du Parti pour la liberté néerlandais de Geert Wilders, du mouvement portugais Chega, et de la Ligue italienne de Matteo Salvini.
Cependant, ce regroupement hétéroclite ne fait pas l’unanimité. Parmi les vice-présidents figure le général italien Roberto Vannacci, un personnage controversé pour ses positions racistes et homophobes. Erwan Lecœur, sociologue spécialiste de l’extrême droite, décrit ce groupe comme « très nettement anti-UE et plutôt pro-Poutine », une orientation qui a suscité de vives critiques à Bruxelles. Terry Reintke, cheffe des eurodéputés Verts, a même qualifié cette alliance de « cadeau à Moscou », l’accusant de vouloir déstabiliser la démocratie européenne.
Les Conservateurs et réformistes européens : un positionnement atlantiste
Les Conservateurs et Réformistes Européens (CRE) ont également renforcé leur présence, passant de 69 à 78 eurodéputés. Ce groupe, créé en 2009, se distingue par son soutien affirmé à l’Ukraine et ses positions atlantistes. Parmi ses membres figurent les Fratelli d’Italia de Giorgia Meloni et des ex-membres de Reconquête, comme Marion Maréchal.
Giorgia Meloni, cherchant à unifier les droites européennes, a modéré son euroscepticisme pour collaborer avec la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Cependant, la création des Patriotes pour l’Europe par Viktor Orban a affaibli sa position, reléguant son groupe au second plan.
Europe des nations souveraines : un nouveau venu controversé
Le groupe Europe des nations souveraines, formé par l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), est le plus récent et le plus petit des trois, avec 25 eurodéputés de huit nationalités. Cette formation fait suite à l’exclusion de l’AfD du groupe Identité et Démocratie (ID) en raison de divers scandales, notamment des soupçons de proximité avec la Chine et la Russie.
Présidé par René Aust (AfD) et Stanislaw Tyszka (Konfederacja polonaise), ce groupe inclut des représentants de partis bulgares, polonais, tchèques, slovaques, lituaniens et hongrois. Sarah Knafo de Reconquête y occupe également une vice-présidence, après avoir été écartée par les autres élus de son parti.
Une extrême droite morcelée
Ces divisions internes montrent que, malgré leur succès électoral, les partis d’extrême droite peinent à s’unir autour d’un agenda commun. Leur influence au Parlement européen, bien que croissante, pourrait être limitée par cette fragmentation. Les Patriotes pour l’Europe, les Conservateurs et réformistes européens, et l’Europe des nations souveraines devront naviguer entre leurs différences pour peser sur les décisions clés de la législature.
Les premières sessions plénières du 16 au 19 juillet seront cruciales pour observer comment ces groupes se positionnent et s’ils parviennent à surmonter leurs divergences pour influencer la politique européenne. En attendant, cette division laisse entrevoir des débats houleux et des alliances fluctuantes au sein de l’hémicycle strasbourgeois.