La Tunisie se trouve au bord d’une crise hydrique sans précédent. Alors que les niveaux des barrages continuent de baisser, l’association Nomad 08 et l’Observatoire tunisien de l’eau lancent un appel pressant : il est temps de déclarer l’état d’urgence hydrique pour faire face à la sécheresse qui frappe le pays de plein fouet.
Des appels à une réaction immédiate
Dans un communiqué publié ce jeudi, ces deux organisations mettent en garde contre l’inaction et l’urgence de la situation. Elles demandent la mise en place immédiate de mesures exceptionnelles, notamment la mobilisation des ressources financières pour soutenir les communautés les plus vulnérables, particulièrement les petits agriculteurs qui sont les premières victimes de cette crise.
Les deux organismes dénoncent le retard pris par les autorités dans la mise en place d’un système de quotas d’eau et de restrictions temporaires sur certains usages. Ils estiment que ces décisions, bien qu’importantes, ne suffisent pas à résoudre le problème de fond : une transformation radicale des politiques hydrauliques nationales est indispensable.
Des propositions concrètes pour une gestion durable
Pour répondre à cette crise, l’Association Nomad 08 et l’Observatoire tunisien de l’eau ont présenté une série de recommandations. Ils préconisent notamment la publication d’un guide simplifié à l’intention des citoyens, détaillant les meilleures pratiques pour le stockage et la préservation de l’eau, ainsi que l’évaluation de la gravité de la situation dans chaque région en fonction des ressources disponibles.
Parmi les mesures suggérées, les organisations insistent sur la nécessité de lutter contre les forages illégaux et les raccordements anarchiques, d’interdire l’utilisation de l’eau distribuée par la Sonede pour remplir les piscines, et de définir une liste des cultures prioritaires en matière d’irrigation, basée sur une carte agricole actualisée.
Les deux organismes appellent également à une meilleure régulation des industries consommatrices d’eau, telles que l’agroalimentaire, le textile, et la transformation des phosphates et du pétrole. Ils recommandent que ces industries soient tenues de réaliser des études hydrauliques pour identifier les ressources en eau utilisées et favoriser des technologies de production plus économes en eau.
Renforcer les infrastructures pour limiter les pertes
Outre les mesures de gestion directe des ressources en eau, l’Association Nomad 08 et l’Observatoire tunisien de l’eau demandent un soutien accru à la Sonede. Ils soulignent la nécessité de renforcer cette institution, tant sur le plan financier qu’en termes de ressources humaines, pour qu’elle puisse renouveler les réseaux vétustes et ainsi réduire les pertes d’eau.
Ils plaident également pour un soutien similaire à l’Office national de l’assainissement afin de permettre le traitement tertiaire des eaux usées, rendant possible leur réutilisation dans les secteurs agricole et industriel.
Baisse alarmante du taux de remplissage des barrages
Selon l’Observatoire national de l’agriculture (Onagri), le taux de remplissage des barrages tunisiens a encore diminué, atteignant 23,2 % au 27 août 2024, contre 23,8 % une semaine plus tôt, le 20 août.
Le volume total des réserves d’eau dans les barrages tunisiens a chuté à 659,36 millions de m³, enregistrant une baisse de 1,15 milliard de m³, soit -63,47 % par rapport à la moyenne saisonnière de la période. Pour rappel, le taux de remplissage était de 34,8 % le 6 mai, de 33,5 % le 24 mai, et de 28,3 % le 13 juillet. Cette diminution continue témoigne de la situation hydrique de plus en plus critique en Tunisie.
Face à cette réalité, le gouvernement a déjà mis en place des mesures strictes pour rationner l’utilisation de l’eau. Les autorités ont interdit l’usage de l’eau potable pour des activités non essentielles comme l’irrigation des espaces verts, le lavage des voitures ou le nettoyage des rues, et ont instauré un système de coupures d’eau nocturnes pour gérer la distribution.
