Dans un geste qui pourrait redéfinir son rôle sur la scène internationale, la Turquie a officiellement soumis une demande d’adhésion au groupe des Brics, une coalition économique influente composée du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de la Chine et de l’Afrique du Sud. Cette démarche marque une volonté claire d’Ankara de diversifier ses alliances et de réduire sa dépendance vis-à-vis de l’Union européenne et des États-Unis.
Le porte-parole du Parti de la justice et du développement (AKP), Ömer Çelik, a confirmé cette ambition : « Notre président a plusieurs fois affirmé que nous voulons devenir membre des Brics. (…) Le processus est en cours. » Cette déclaration souligne l’importance stratégique que la Turquie accorde à cette démarche, alors que les tensions avec ses partenaires occidentaux se multiplient.
Le groupe des Brics, récemment élargi pour inclure l’Égypte, les Émirats arabes unis, l’Éthiopie et l’Iran, plaide pour une refonte des institutions internationales afin de refléter l’émergence de nouvelles puissances économiques. L’adhésion d’Ankara à ce groupe représenterait une rupture significative avec ses alliances traditionnelles.
Des relations en tension avec ses alliés occidentaux
Les relations entre la Turquie et ses alliés occidentaux se détériorent de manière croissante. Les liens d’Ankara avec Moscou, en particulier à la lumière de la guerre en Ukraine, ainsi que les divergences sur le soutien à Israël dans le conflit à Gaza, ont exacerbé les frictions. De plus, le processus d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne, au point mort depuis des années, contribue à ce climat de mécontentement.
Rappelons que l’Union européenne reste de loin le premier partenaire commercial de la Turquie, représentant plus de 40 % de ses exportations en 2023. Cependant, le refus de moderniser l’union douanière, en place depuis 1996, alimente les frustrations d’Ankara. Cette situation renforce la détermination de la Turquie à se tourner vers de nouvelles alliances.
Une nouvelle stratégie économique et géopolitique
En rejoignant les Brics, la Turquie espère tirer parti de sa position stratégique entre l’Asie et l’Europe pour renforcer son influence économique et géopolitique. Ce mouvement s’inscrit dans une stratégie plus large visant à diversifier ses relations internationales et à diminuer sa dépendance vis-à-vis des puissances occidentales.
Le processus d’adhésion aux Brics est loin d’être simple et nécessitera un examen approfondi lors du prochain sommet prévu pour fin octobre. En Turquie, la démarche du président Erdogan semble bénéficier d’un soutien interne relativement large. Les principaux opposants politiques, bien que favorables à un maintien de l’ancrage occidental, ne rejettent pas l’idée d’approfondir les relations avec d’autres grandes puissances, y compris la Russie.
La candidature de la Turquie aux Brics représente un tournant majeur dans sa politique étrangère. En cherchant à se réinventer et à réduire sa dépendance vis-à-vis de ses partenaires traditionnels, Ankara pourrait non seulement redéfinir son rôle international mais aussi influencer de manière significative la dynamique des alliances globales.