Le président chinois Xi Jinping a annoncé ce jeudi 5 septembre que la Chine allouera un financement de 50 milliards de dollars à l’Afrique au cours des trois prochaines années, lors de l’ouverture du Forum sur la coopération sino-africaine (Focac) à Pékin. Cette initiative vise à renforcer les relations économiques entre les deux partenaires, alors que le déficit commercial africain avec la Chine continue de croître.
« La Chine est prête à approfondir sa coopération avec l’Afrique dans l’industrie, l’agriculture, les infrastructures, le commerce et les investissements », a déclaré Xi Jinping devant les dirigeants africains venus en nombre pour cet événement. Une quarantaine de pays étaient représentés, espérant signer des accords et bénéficier de ce nouveau soutien financier.
Un appui financier massif et des promesses d’emplois
La Chine, premier partenaire commercial de l’Afrique, a déjà investi massivement sur le continent ces dernières décennies, notamment dans le développement des infrastructures. En 2022, les échanges bilatéraux ont atteint 167,8 milliards de dollars, mais le déséquilibre est frappant. Selon les dernières données, le déficit commercial de l’Afrique envers la Chine s’élève à plus de 60 milliards d’euros.
« Au cours des trois prochaines années, le gouvernement chinois est prêt à fournir un soutien financier d’un montant de 360 milliards de yuans (50,7 milliards de dollars) », a précisé Xi Jinping. Ce financement sera accompagné de la création d’au moins un million d’emplois sur le continent africain.
Une dépendance croissante
Cependant, la coopération économique sino-africaine ne va pas sans son lot de critiques. Bien que la Chine ait promis de diversifier ses importations en provenance d’Afrique, en particulier en augmentant l’achat de produits agricoles tels que le café, les avocats ou les fleurs, la majorité des exportations africaines reste dominée par les matières premières brutes comme le pétrole, le gaz et les minerais.
Malgré l’enthousiasme entourant les « nouvelles routes de la soie », qui devaient encourager le développement industriel africain, les investissements chinois dans des projets de transformation industrielle sont restés limités, concentrés principalement en Égypte et au Maroc. Comme l’explique un expert, Thierry Pairault, directeur de recherche au CNRS et spécialiste des relations sino-africaines au micro de RFI : « La dépendance commerciale reste totale envers la Chine, de loin premier client de l’Afrique, alors que les fournisseurs africains sont mineurs pour Pékin. »
Des financements moins transparents
L’un des aspects de plus en plus débattus concerne les modalités de ces prêts. De plus en plus, les financements ne proviennent plus directement de l’État chinois, mais d’entreprises publiques ou privées chinoises, rendant la gestion de la dette plus opaque. Thierry Pairault note que ces financements changent de forme : « Les prêts aux pays africains n’ont pas forcément autant diminué qu’on pourrait le penser, ils ont changé de cheminement. »
Cette nouvelle dynamique, où des entreprises chinoises accordent des facilités de paiement ou s’arrangent directement avec les gouvernements locaux, complexifie le suivi des dettes. Un phénomène particulièrement préoccupant pour certains pays africains, déjà lourdement endettés envers la Chine, comme le Nigeria ou l’Angola.
Des engagements pour plusieurs pays africains
En marge du sommet, plusieurs dirigeants africains ont obtenu des accords bilatéraux avec la Chine. Le président zambien, Hakainde Hichilema, a par exemple annoncé la signature d’un accord avec la société chinoise PowerChina pour l’installation de panneaux solaires sur les toits zambiens, dans le cadre d’une politique de transition énergétique.
Le Kenya, représenté par son président William Ruto, a également sécurisé des engagements de la Chine, notamment l’ouverture de son marché aux produits agricoles kényans et le financement de projets d’infrastructures comme l’expansion de la ligne ferroviaire Standard gauge railway reliant Nairobi au port de Mombasa. William Ruto a salué ces progrès, tout en rappelant que son pays devait encore rembourser plus de 8 milliards de dollars de dette à la Chine. Il a également obtenu l’engagement de Pékin pour la construction de l’autoroute Rironi-Mau Summit-Malaba, un projet de 1,2 milliard de dollars.
En Tanzanie, la présidente Samia Suluhu Hassan a assuré que la Chine ferait avancer le projet de train reliant son pays à la Zambie, essentiel pour dynamiser le commerce régional. Quant au Zimbabwe, des discussions ont été entamées pour renforcer la coopération dans les domaines de l’agriculture, des énergies renouvelables et des infrastructures.
Une coopération tournée vers l’avenir
Présent également au sommet, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a souligné l’importance de la coopération sino-africaine dans la lutte contre le changement climatique. « Le bilan remarquable de la Chine en matière de développement, notamment en ce qui concerne l’éradication de la pauvreté, est une grande source d’expérience et d’expertise », a-t-il déclaré, avant d’ajouter que la Chine et l’Afrique pouvaient « mener la révolution des énergies renouvelables ensemble ».
Avec l’annonce de ce financement de 50 milliards de dollars, la Chine réaffirme son rôle central en Afrique. Mais au-delà des sommes investies, de nombreux défis restent à relever pour rééquilibrer cette relation commerciale et assurer un développement durable sur le continent.