À deux semaines du congrès annuel des organismes HLM, qui se tiendra à Montpellier du 24 au 26 septembre 2024, l’Union Sociale pour l’Habitat (USH) a dévoilé un état des lieux préoccupant du logement social en France. Lors d’une conférence de presse tenue le 11 septembre, Emmanuelle Cosse, présidente de l’USH, a mis en lumière une situation critique, marquée par l’augmentation continue des demandes de logements sociaux et une baisse alarmante des constructions HLM.
l’explosion de la demande
Le nombre de candidats à la location d’un logement social en France continue de croître, atteignant 2,7 millions de ménages au 30 juin 2024. Ce chiffre, en hausse de 100 000 par rapport à la fin de l’année 2023, reflète une augmentation de 24 % en cinq ans. Emmanuelle Cosse exprime son inquiétude face à cette accélération, soulignant que de nouveaux profils, souvent exclus du marché locatif privé, rejoignent les rangs des demandeurs. Cette situation résulte notamment de la flambée des taux de crédit, rendant l’accession à la propriété de plus en plus inaccessible pour de nombreux ménages.
Les locataires des logements sociaux sont majoritairement des personnes percevant de faibles revenus, souvent proches du SMIC, ou des familles monoparentales. Ces dernières représentent près du quart des locataires de HLM, alors qu’elles ne constituent que 10 % de la population française. Plus d’un tiers des locataires HLM vivent sous le seuil de pauvreté, un taux bien supérieur aux 15 % observés dans l’ensemble des ménages français.
La chute de la construction de logements sociaux
La hausse de la demande de logements sociaux coïncide avec une chute drastique de la construction. En 2023, seulement 82 000 à 83 000 logements HLM ont été construits, contre 120 000 il y a cinq ou six ans. Cette tendance, qui devrait se maintenir en 2024, est attribuée à plusieurs facteurs, notamment le manque de volonté politique au niveau local et national.
Emmanuelle Cosse pointe du doigt l’attitude de certains maires, réticents à la construction de logements sociaux dans leurs communes. De plus, la politique de lutte contre l’artificialisation des sols freine également les nouvelles constructions, tant dans le secteur privé que social.
Des mesures gouvernementales pénalisantes
Depuis 2017, les mesures prises par le gouvernement d’Emmanuel Macron ont mis à mal la capacité des bailleurs sociaux à financer la construction de nouveaux logements. L’augmentation de la TVA sur les nouveaux logements de 5,5 % à 10 %, ainsi que la réduction des aides au logement (APL), ont privé les organismes HLM de 14 milliards d’euros sur sept ans. Selon Emmanuelle Cosse, ces contraintes financières ont empêché la construction de 182 300 logements depuis 2017.
Des délais d’attribution qui s’allongent
Face à une demande croissante et une offre insuffisante, le temps d’attente pour obtenir un logement social s’est considérablement allongé. En moyenne, il faut désormais compter entre 6 et 7 ans pour se voir attribuer un HLM en France, et jusqu’à 10 ans en Île-de-France. En 2023, seulement 390 000 logements sociaux ont été attribués, contre près de 500 000 en 2015.
Par ailleurs, la question de la rénovation énergétique des logements sociaux est source de préoccupation. « En 2024, les bailleurs sociaux avaient déposé des demandes de subventions pour financer 1 milliard d’euros de travaux de rénovation énergétique », a souligné Emmanuelle Cosse.
Cependant, le projet de loi de finances pour 2025 pourrait réduire de moitié les 400 millions d’euros prévus pour soutenir ces rénovations. Cette décision inquiète particulièrement dans un contexte où le parc social devra se conformer aux nouvelles normes énergétiques, avec l’interdiction de louer des logements mal isolés (étiquetés G, F ou E sur le Diagnostic de Performance Énergétique) à partir de 2025.