Le Secours populaire a tiré la sonnette d’alarme avec son 18e baromètre annuel sur la pauvreté, publié le 12 septembre. Les résultats de cette enquête, réalisée par Ipsos, révèlent une dégradation alarmante des conditions de vie en France, avec un nombre croissant de citoyens se considérant en situation de précarité. Face à une inflation persistante et un coût de la vie en hausse, les difficultés quotidiennes touchent un nombre toujours plus important de ménages, notamment les plus modestes.
Un seuil de pauvreté ressenti qui frôle le SMIC
En 2024, un Français se considère pauvre s’il dispose de moins de 1 396 euros par mois, soit une légère augmentation par rapport à 2023 (+19 euros). Ce montant est proche du salaire minimum net, fixé à 1 398 euros, illustrant une situation critique où de nombreux foyers vivent à la limite de la précarité.
Ce seuil subjectif varie selon les régions et la composition des ménages. En Île-de-France, où le coût de la vie est plus élevé, il grimpe à 1 431 euros par mois. Quant aux familles avec enfants, elles estiment qu’il faut au moins 1 447 euros pour s’en sortir. Ces chiffres contrastent avec le seuil de pauvreté officiel établi par l’Insee, qui s’élève à 1 158 euros mensuels pour une personne seule.
Une majorité de Français redoutent la précarité
Le baromètre du Secours populaire met en lumière une réalité inquiétante : 62 % des Français ont déjà ressenti ou redouté une situation de pauvreté, un chiffre en hausse de quatre points par rapport à l’année précédente. Pire encore, 40 % affirment avoir déjà vécu dans la pauvreté à un moment de leur vie. Cette tendance est encore plus marquée chez les ouvriers, dont 80 % ont été ou sont proches de la précarité.
Ce constat est particulièrement frappant en milieu rural, où 69 % des habitants disent avoir été touchés par la pauvreté ou avoir craint de l’être. Ce sentiment de fragilité est également présent chez les parents : près de huit sur dix craignent que leurs enfants soient un jour confrontés à des difficultés financières similaires.
Des dépenses essentielles difficiles à assumer
Les difficultés financières touchent désormais des postes de dépense essentiels. Près de la moitié des Français (47 %) rencontrent des problèmes pour payer leurs factures énergétiques, un chiffre record cette année, particulièrement en zone rurale (57 %). L’augmentation des prix de l’électricité, malgré les mesures gouvernementales, pousse 43 % des ménages à réduire leur chauffage, même en hiver.
Le logement devient également une source d’angoisse pour de nombreux foyers. Selon l’étude, 38 % des sondés peinent à régler leur loyer ou les charges liées à leur domicile. La situation est tout aussi préoccupante pour les parents : 45 % ont du mal à subvenir aux besoins de leurs enfants, qu’il s’agisse de fournitures scolaires, de vêtements ou de cantine.
Santé et alimentation pèsent sur le budget
La crise touche aussi le domaine de la santé. Les frais médicaux mal remboursés par la Sécurité sociale pèsent lourdement sur les budgets : 43 % des Français ont du mal à y faire face. De plus, 29 % peinent à payer leur mutuelle santé, reléguant ainsi ce service au second plan malgré son importance.
L’alimentation, elle aussi, devient un luxe pour certains. Un tiers des Français n’arrivent pas à garantir trois repas par jour à leur foyer. Cette situation pousse près d’un parent sur trois à se priver de nourriture pour assurer celle de leurs enfants. Par ailleurs, seuls 61 % des sondés disent pouvoir consommer des fruits et légumes frais chaque jour.
Une précarité qui touche tous les aspects de la vie
Les privations ne se limitent pas aux besoins vitaux. Selon l’étude, 35 % des Français renoncent à pratiquer des activités sportives ou des loisirs, faute de moyens. Le soin de soi devient aussi secondaire : 31 % des répondants déclarent qu’ils ne peuvent plus se permettre des dépenses pour leur apparence, comme aller chez le coiffeur.
Le fossé se creuse également entre les différentes classes sociales. Si 52 % des Français disent ne pas pouvoir épargner, cette proportion grimpe à 69 % chez les ouvriers et 25 % chez les employés. À l’inverse, 69 % des cadres supérieurs affirment pouvoir mettre de l’argent de côté régulièrement.
La solidarité, dernier rempart contre la précarité
Malgré ce constat alarmant, la solidarité reste forte en France. Le Secours populaire mobilise quotidiennement 90 000 bénévoles pour venir en aide aux personnes en difficulté. Et la population continue de manifester sa volonté d’aider les plus précaires : 66 % des Français se disent prêts à s’impliquer pour soutenir ceux qui sont touchés par la pauvreté.
L’édition 2024 du baromètre de la pauvreté du Secours populaire indique que les Français sont de plus en plus nombreux à se sentir vulnérables face à l’augmentation des prix et à l’insuffisance de leurs revenus. Les inégalités continuent de se creuser, et la précarité gagne du terrain, notamment dans les zones rurales.