Le Conseil constitutionnel a validé, jeudi, la nouvelle taxe sur les infrastructures de transport de longue distance, une mesure au cœur du budget 2024 destinée à financer la transition écologique. Contestée par les gestionnaires d’aéroports et d’autoroutes, cette taxe suscite des craintes quant à ses répercussions économiques, tandis que le gouvernement défend son rôle dans la lutte contre le changement climatique.
600 millions d’euros par an pour la transition écologique
Cette taxe, qui devrait rapporter 600 millions d’euros par an, vise à financer des projets de mobilité durable. L’intégralité de cette somme sera allouée à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit), l’organisme chargé de moderniser les infrastructures de transport en France. Le gouvernement justifie cet impôt en soulignant son importance dans la stratégie nationale de transition écologique, avec un soutien financier crucial pour les infrastructures ferroviaires et autres modes de transport durables.
Une répartition inégale entre autoroutes et aéroports
Les entreprises autoroutières et aéroportuaires seront les principales contributrices de cette nouvelle taxe. Selon le schéma établi par Bercy, les trois quarts de la contribution seront supportés par le secteur autoroutier, tandis que le secteur aérien, ciblant seulement les grands aéroports comme Orly, Roissy, Nice, Marseille et Lyon, prendra en charge le quart restant.
L’entreprise Vinci Autoroutes a rapidement réagi, estimant que cette taxe lui coûtera 280 millions d’euros pour l’année 2024. Face à cette nouvelle charge, les sociétés autoroutières ont évoqué la possibilité d’augmenter de manière significative le tarif des péages dès 2025, pour compenser ce manque à gagner. Le gouvernement, pour sa part, a minimisé cette menace, rappelant que les prix des péages sont calculés en fonction de l’inflation et des investissements des concessionnaires.
Une menace pour la compétitivité des aéroports français ?
Dans le secteur aérien, les réactions sont tout aussi vives. Thomas Juin, président de l’Union des aéroports français (UAF), s’inquiète des répercussions de cette nouvelle taxe sur la compétitivité des aéroports nationaux. « Cette nouvelle taxe, qui est mise en œuvre uniquement en France, positionne les aéroports français en difficulté par rapport aux autres aéroports en Europe, en sachant qu’il y a une compétition qui ne cesse de se développer », a-t-il déclaré.
Les gestionnaires d’aéroports critiquent également le cumul de cette taxe avec l’impôt sur les sociétés, qu’ils qualifient de « prélèvement confiscatoire », menaçant ainsi, selon eux, leur viabilité économique.
Le Conseil constitutionnel tranche en faveur du gouvernement
Malgré ces critiques, le Conseil constitutionnel a rejeté les arguments avancés par les entreprises concernées. Les Sages du Palais Royal ont jugé que cette taxe, calculée en fonction du chiffre d’affaires et de la rentabilité, ne créait pas de rupture d’égalité avec les autres exploitants d’infrastructures de transport. Ils ont également estimé qu’elle ne constituait pas une « charge excessive au regard de leurs facultés contributives ».
Le soutien des acteurs écologistes
Si la taxe soulève des inquiétudes chez les opérateurs, elle est largement saluée par les défenseurs de l’environnement. Alexis Chailloux, responsable des voyages bas carbone et de l’engagement citoyen chez Greenpeace, a rappelé que le secteur aérien bénéficie depuis longtemps d’exonérations fiscales. « Les compagnies ne paient ni taxe sur le kérosène – un manque à gagner estimé à 7,2 milliards d’euros selon le Réseau Action Climat – ni TVA sur les billets d’avion internationaux. Soit un total de 9,5 milliards environ, soit 66 euros ”offerts” par l’État au secteur aérien par passager », a-t-il souligné dans les colonnes de L’Humanité.
Pour Chailloux, cette nouvelle taxe corrige une situation injuste : « Mettre à contribution l’aérien permet de financer le ferroviaire et de ne plus prendre l’avion à bas prix. Les compagnies se plaignent, mais on résout simplement une injustice. » Cette approche vise à encourager un transfert vers des modes de transport plus écologiques, notamment le train, dans un contexte de lutte contre le changement climatique.