Ce dimanche 15 septembre, alors que Michel Barnier s’attelle à former son équipe gouvernementale, les tractations au sein de la majorité et de l’opposition s’intensifient. En ligne de mire : les ambitions des Républicains (LR), dont certains cadres aspirent à des portefeuilles clés. Une situation qui n’a pas manqué de faire réagir le ministre démissionnaire de l’Agriculture, Marc Fesneau, également président du groupe MoDem à l’Assemblée nationale. Dans une interview à La Tribune Dimanche, il adresse un avertissement à la droite républicaine, la mettant en garde contre des prétentions jugées démesurées.
« Quand on n’a que 47 députés, on ne peut pas imposer sa politique »
Alors que plusieurs noms de personnalités républicaines, tels que Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau, circulent pour occuper des postes régaliens dans le futur gouvernement, Fesneau tient à rappeler la réalité de la représentation politique des LR à l’Assemblée nationale. « Quand on n’a que 47 députés, on ne peut pas imposer sa politique », a martelé le député du Loir-et-Cher, soulignant la nécessité pour chaque groupe parlementaire d’ajuster ses attentes en fonction de son poids réel au Palais Bourbon.
Cette déclaration intervient alors que Annie Genevard, secrétaire générale des Républicains, est également pressentie pour le ministère de l’Éducation nationale. Une ambition qui semble cristalliser des tensions au sein de la majorité. Fesneau insiste sur l’importance d’un « équilibre gouvernemental qui tienne compte de la réalité de l’Assemblée nationale », pointant du doigt ce qu’il considère comme un comportement opportuniste des Républicains : « LR se comporte de la même manière que le Nouveau Front populaire cet été, estimant qu’il pouvait imposer sa politique malgré seulement 193 voix ».
« Ils n’ont pas les moyens de la politique qu’ils appellent de leurs vœux »
Au-delà des simples chiffres, Marc Fesneau dénonce ce qu’il considère comme une surenchère de la droite. « Ils n’ont pas les moyens de la politique qu’ils appellent de leurs vœux », affirme-t-il, rappelant que si les électeurs avaient voulu une majorité républicaine, ils l’auraient exprimé dans les urnes. « Si les Français avaient voulu une politique de droite, ils auraient élu 289 députés LR. Force est de constater qu’ils ne l’ont pas fait », déclare-t-il, dans un rappel cinglant de la défaite électorale des Républicains.
Cette mise en garde intervient alors que plusieurs députés de l’ex-majorité expriment leur scepticisme quant à la politique que pourra mener Michel Barnier à la tête du gouvernement. Des voix au sein du MoDem, dont celle de Marc Fesneau, redoutent que les ambitions de la droite républicaine ne mettent en péril l’équilibre fragile du futur gouvernement.
Appel à la retenue
Marc Fesneau n’est pas seul à émettre des réserves. Cyrille Isaac-Sibille, député MoDem du Rhône, appelle également à plus de retenue de la part des Républicains. « Nous avons tous besoin de nous respecter et de nous écouter », a-t-il déclaré, insistant sur la nécessité d’une collaboration constructive au sein de la majorité et de l’opposition. Selon lui, ni la droite républicaine ni son programme n’ont remporté les élections, ce qui devrait limiter leurs revendications.
Jean-Noël Barrot, vice-président du MoDem et président de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, abonde dans ce sens. Dans un entretien au Journal du Dimanche, il a rappelé que « Ni la Droite républicaine ni son projet n’ont gagné les élections », insistant sur le fait que les Républicains ne disposent d’aucun droit à un « quota » ou un « domaine réservé » au sein du futur gouvernement.
« Un gouvernement qui ferait l’impasse sur le centre serait condamné à l’échec »
L’un des enjeux majeurs de la formation du gouvernement de Michel Barnier réside dans l’équilibre des forces entre les différentes composantes de la majorité. Pour Jean-Noël Barrot, la voix du centre ne peut être ignorée sous peine de fragiliser l’exécutif. « Pour garantir l’équilibre du nouveau gouvernement et lui assurer stabilité et longévité, le poids de ce courant politique ne saurait excéder celui de son groupe à l’Assemblée nationale », a-t-il averti, estimant qu’un gouvernement négligeant le MoDem serait « condamné à l’échec ».
Cette offensive coordonnée du MoDem, visant à contrer les ambitions des Républicains, ne facilitera certainement pas la tâche de Michel Barnier. Le Premier ministre doit composer avec une droite qui conditionne son soutien à une rupture avec le macronisme, tout en lorgnant sur des portefeuilles clés comme ceux de l’Intérieur, de la Justice, de l’Éducation nationale et de l’Économie.