Thierry Breton, Commissaire européen au Marché intérieur, a démissionné de son poste avec effet immédiat ce lundi 16 septembre. Une décision choc qui met en lumière les tensions au sein de l’exécutif bruxellois et entre lui et la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen. Un départ qui pourrait bien bouleverser les équilibres politiques au sein de l’Union européenne.
« Un honneur de servir le bien commun européen »
Dans son message de démission, Thierry Breton a pris soin de rappeler son engagement en faveur de l’Union européenne, au-delà des considérations nationales. « Au cours des cinq dernières années, je me suis efforcé sans relâche de défendre et de faire progresser le bien commun européen, au-delà des intérêts nationaux et partisans. Ce fut un honneur », a-t-il affirmé.
Cependant, face aux récents développements, il conclut : « À la lumière des derniers événements – qui témoignent une fois de plus d’une gouvernance douteuse – je dois conclure que je ne peux plus exercer mes fonctions au sein du Collège ». Ce départ marque la fin d’une période tumultueuse au sein de la Commission, mais aussi un tournant pour Thierry Breton, ancien ministre français, qui a joué un rôle clé dans des dossiers cruciaux comme le numérique et l’industrie en Europe.
Une démission inattendue
Dans une lettre adressée à Ursula von der Leyen, publiée sur le réseau social X (anciennement Twitter), Thierry Breton a officialisé sa démission. « Je démissionne de mon poste de commissaire européen, avec effet immédiat », a-t-il écrit, soulignant une décision difficile mais nécessaire. Officiellement candidat pour un second mandat en tant que représentant de la France au sein de la Commission, Breton affirme que von der Leyen a demandé à Emmanuel Macron de retirer sa candidature.
Selon ses dires, cette décision a été prise sans qu’aucune discussion directe n’ait eu lieu entre lui et la présidente. « Il y a quelques jours, dans la toute dernière ligne droite des négociations sur la composition du futur Collège, vous avez demandé à la France de retirer mon nom – pour des raisons personnelles qu’en aucun cas vous n’avez discutées directement avec moi », écrit-il. Une situation qu’il qualifie de « gouvernance douteuse ».
Tensions croissantes avec Ursula von der Leyen
Les relations entre Thierry Breton et Ursula von der Leyen étaient loin d’être sereines. Depuis le printemps dernier, le commissaire français s’était montré critique envers le style de direction de la présidente, qu’il jugeait « peu collectif ». Les désaccords avaient atteint leur paroxysme en début d’année, lorsque Breton avait dénoncé la nomination de l’eurodéputé allemand Markus Pieper, membre du Parti populaire européen (PPE), à un poste clé chargé des petites et moyennes entreprises.
Cette nomination, qui intervenait peu avant un congrès décisif du PPE à Bucarest, avait soulevé des questions éthiques de la part de Breton. Il avait publiquement critiqué cette décision, l’assimilant à du favoritisme, et avait poussé à un vote de défiance contre von der Leyen au Parlement européen. Si Markus Pieper avait fini par renoncer à ce poste, la réélection de von der Leyen en juillet 2024 n’a pas apaisé les tensions.
La France cherche un remplaçant
Pour la France, ce retrait de Thierry Breton survient à un moment stratégique, alors que la composition du futur Collège des commissaires européens est encore en cours de négociation. Dans sa lettre, Breton laisse entendre qu’un portefeuille « prétendument plus influent » aurait été offert à la France en guise de compromis. « C’est un autre candidat qui va vous être proposé » par la France, ajoute-t-il, sans plus de précisions.
Cette nouvelle donne politique met Paris sous pression. Le choix du remplaçant de Thierry Breton pourrait déterminer l’influence que la France exercera au sein de l’exécutif européen pour les cinq années à venir. Le gouvernement français doit désormais proposer un candidat capable de défendre ses intérêts dans un contexte particulièrement tendu.
Une situation délicate à Bruxelles
La démission de Thierry Breton survient dans un contexte déjà compliqué pour Ursula von der Leyen. La formation du nouveau Collège des commissaires européens fait face à plusieurs obstacles. En Slovénie, la nomination de Marta Kos, candidate au poste de commissaire, est toujours en attente d’approbation par le Parlement national. Ce blocage, ajouté au retrait de Thierry Breton, rend l’équation d’autant plus complexe pour la présidente de la Commission.
Le futur Collège doit refléter un équilibre délicat entre les États membres, les grandes familles politiques européennes, et les priorités stratégiques de l’Union. En parallèle, Ursula von der Leyen s’apprête à présenter les noms et portefeuilles des nouveaux commissaires lors d’une plénière à Strasbourg, un exercice d’équilibrisme qui s’annonce plus difficile que prévu.