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L’Allemagne rétablit des contrôles aux frontières pour lutter contre l’immigration illégale

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À compter de ce lundi 16 septembre, l’Allemagne réintroduit des contrôles policiers à ses frontières terrestres pour une durée de six mois. L’objectif affiché par Berlin : renforcer la lutte contre l’immigration illégale, dans un contexte sécuritaire tendu et sous la pression de la montée de l’extrême droite. Cette décision, qualifiée de « controversée », marque un tournant dans la politique migratoire allemande et suscite de vives réactions au sein de l’Union européenne.

Des contrôles renforcés à toutes les frontières terrestres

Les nouvelles mesures prises par Berlin concernent les frontières avec la France, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Belgique et le Danemark, en plus des contrôles déjà en place avec la Pologne, la République tchèque, l’Autriche et la Suisse. Le gouvernement allemand déploie des dispositifs policiers mobiles et stationnaires afin de renforcer le filtrage des entrées sur son territoire.

Ces contrôles, qui auraient dû être abolis au sein de l’espace Schengen pour garantir la libre circulation des personnes, sont rétablis en vertu d’une clause permettant leur activation en cas de menace pour l’ordre public ou la sécurité. Berlin a justifié sa décision en invoquant les récentes attaques terroristes survenues en Allemagne, notamment un attentat au couteau perpétré fin août à Solingen par un Syrien, revendiqué par l’État islamique, qui a coûté la vie à trois personnes.

Une décision qui fait réagir en Europe

La réintroduction de ces contrôles aux frontières intérieures a provoqué de vives réactions dans plusieurs capitales européennes. La Commission européenne, tout en reconnaissant la légalité de ces mesures, a tenu à rappeler qu’elles doivent rester « strictement exceptionnelles » et proportionnées à la menace. « Nous devons protéger l’espace Schengen, qui est l’une des plus grandes réussites de l’Union européenne », a déclaré un porte-parole de la Commission.

Varsovie a été l’une des premières à réagir. Le ministre polonais de l’Intérieur, Tomasz Siemoniak, a qualifié cette décision d’« inacceptable », estimant qu’elle pourrait « affecter des millions de citoyens polonais et allemands ». En Autriche, le gouvernement a également exprimé son mécontentement, refusant catégoriquement d’accepter les migrants refoulés par l’Allemagne.

Un tournant dans la politique migratoire allemande

L’Allemagne, longtemps perçue comme un modèle d’accueil pour les réfugiés, amorce un revirement significatif de sa politique migratoire. Entre 2015 et 2016, lors de la crise migratoire, le pays avait ouvert ses portes à plus d’un million de réfugiés, principalement en provenance de Syrie. En 2022, après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, Berlin avait de nouveau accueilli plus d’un million de réfugiés ukrainiens.

Cependant, la pression politique interne pousse aujourd’hui le gouvernement d’Olaf Scholz à revoir sa stratégie. Les élections régionales récentes en Saxe et en Thuringe ont révélé une montée inquiétante de l’extrême droite, qui exploite le mécontentement croissant face aux politiques migratoires jugées trop laxistes. Nancy Faeser, ministre de l’Intérieur, a justifié ce durcissement en déclarant qu’« aucun pays au monde ne peut accueillir des réfugiés de manière illimitée ».

Les effets domino en Europe

Ce retour des contrôles en Allemagne pourrait avoir des répercussions au-delà de ses frontières. Aux Pays-Bas, la coalition au pouvoir, qui inclut le Parti pour la liberté (PVV), d’extrême droite, envisage également de durcir sa législation en matière d’asile. En Autriche, la décision de Berlin pourrait entraîner des frictions supplémentaires avec Vienne, qui refuse catégoriquement de gérer les flux de migrants refoulés par l’Allemagne.

La Grèce, en première ligne de l’immigration en Europe, se retrouve également au cœur du débat. Confrontée à une forte augmentation des arrivées en provenance de Turquie, Athènes redoute que la fermeture des frontières au nord de l’Europe n’aggrave la situation sur son territoire. Le Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, a estimé que « la réponse ne peut pas être la suppression unilatérale de Schengen ».

Les inquiétudes des travailleurs frontaliers

Outre les tensions politiques, cette décision allemande soulève également des préoccupations d’ordre économique. En particulier, les travailleurs frontaliers redoutent des répercussions sur leurs déplacements quotidiens. Dans la région du Schleswig-Holstein, à la frontière avec le Danemark, environ 12 800 salariés franchissent la frontière chaque jour pour travailler. Le SSW, parti représentant la minorité danoise dans cette région, a fustigé cette mesure, la qualifiant « d’actionnisme pur » et déplorant ses effets potentiellement néfastes pour l’économie locale.

Un défi pour l’Union européenne

Le rétablissement des contrôles aux frontières par l’Allemagne, bien qu’il réponde à des impératifs sécuritaires internes, met en lumière les tensions croissantes autour des politiques migratoires au sein de l’Union européenne. Si Berlin insiste sur la nécessité de protéger ses citoyens, cette décision pourrait ébranler les fondements mêmes de l’espace Schengen et fragiliser davantage la coopération entre les États membres. À l’heure où l’Europe peine à trouver une réponse commune aux défis migratoires, le geste de l’Allemagne pourrait bien ouvrir une nouvelle ère de divisions sur le vieux continent.

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