Jeudi 19 septembre, les commissions des Finances de l’Assemblée nationale et du Sénat ont reçu les documents budgétaires du gouvernement démissionnaire. Transmis par les services du nouveau Premier ministre, Michel Barnier, ces documents dévoilent un projet de loi de Finances pour 2025 marqué par des réductions significatives des crédits alloués au ministère du Travail et de l’Emploi. Parmi les secteurs les plus touchés, l’apprentissage, avec des coupes dans les aides à l’embauche.
Une réduction drastique du budget du Travail
Selon les documents transmis, le budget du ministère du Travail et de l’Emploi devrait être réduit de 6,9%, soit une baisse de 2,3 milliards d’euros. Cette coupe budgétaire, bien que redoutée, était largement attendue. Le gouvernement justifie cette décision en soulignant que la France connaît actuellement un taux de chômage historiquement bas, proche de 7%, le plus faible enregistré depuis plus de quarante ans.
Toutefois, cette baisse des crédits pourrait avoir des conséquences importantes sur plusieurs dispositifs clés, notamment l’apprentissage, qui, selon la Cour des comptes, a coûté près de 17 milliards d’euros en 2022.
Les aides à l’apprentissage dans le collimateur
L’un des points centraux de cette révision concerne les aides à l’apprentissage. Jusqu’à présent, les employeurs recevaient une prime de 6 000 euros pour chaque apprenti embauché dans le cadre de la première année de contrat, une mesure mise en place pour soutenir l’emploi des jeunes après la crise du Covid-19. Cette aide pourrait être considérablement réduite, notamment pour les apprentis de niveau master et plus.
« Le dispositif a été conçu dans le contexte de la crise Covid, où il était crucial d’aider à l’insertion des jeunes sur le marché du travail », reconnaît Céline Morinière Lambert, directrice adjointe des ressources humaines chez Ingérop, une société d’ingénierie employant près de 100 alternants par an. « Cependant, il est vrai que dans certains secteurs où le marché est plus dynamique, il y a aujourd’hui moins besoin d’aide pour favoriser l’insertion professionnelle. »
Morinière Lambert se dit toutefois préoccupée par les conséquences potentielles de cette réduction. Si les aides à l’apprentissage sont supprimées ou fortement réduites, certaines entreprises pourraient revoir à la baisse leurs recrutements.
« Certaines de nos entités vont devoir revoir légèrement leurs plans de recrutement d’apprentis, ou les remplacer par des stagiaires », indique-t-elle au micro de franceinfo.
Une réforme des aides attendue
Le gouvernement a justifié la baisse des aides par la volonté de cibler davantage les secteurs qui en ont réellement besoin. Selon les estimations de l’administration, ces réformes pourraient représenter une économie de 550 millions d’euros pour l’État dès 2025.
Le précédent gouvernement avait d’ores et déjà laissé entendre que le système de primes devait être ajusté. En effet, certaines primes, notamment celles destinées aux niveaux supérieurs d’apprentissage, semblent moins essentielles dans des secteurs où les opportunités d’emploi sont nombreuses. Cette réduction s’inscrit dans une stratégie plus large de rationalisation des dépenses publiques.
Inquiétudes dans les rangs du ministère du Travail
Cette réforme budgétaire ne concerne pas uniquement l’apprentissage. Plusieurs autres dispositifs d’insertion et de soutien à l’emploi pourraient également être affectés par les coupes budgétaires. Parmi eux, l’allocation de solidarité spécifique, qui encourage le retour à l’emploi des chômeurs de longue durée, ou encore les financements pour la validation des acquis de l’expérience (VAE), pourraient être remis en question.
Les emplois francs, qui visent à encourager l’embauche dans les quartiers prioritaires, ainsi que le Fonds national de l’emploi – Formation, sont également susceptibles de subir des réductions. En outre, les opérateurs publics tels que France Travail (anciennement Pôle emploi) et France Compétences pourraient voir leurs budgets diminuer.
Ces perspectives suscitent de vives inquiétudes au sein du ministère du Travail. Plusieurs syndicats et associations alertent sur les conséquences de ces mesures, qui risquent d’affaiblir les dispositifs d’aide à l’emploi.
Vers un million de contrats d’apprentissage d’ici 2027
Malgré ces coupes, l’objectif affiché par le gouvernement demeure ambitieux. Il vise à atteindre un million de nouveaux contrats d’apprentissage par an d’ici 2027. Une cible jugée réalisable malgré la baisse des aides, selon les autorités.
Le projet de loi de Finances pour 2025, avec la réduction notable du budget du ministère du Travail et de l’Emploi, témoigne de la volonté du gouvernement de rationaliser les dépenses publiques dans un contexte de reprise économique. Cependant, les acteurs du secteur craignent que ces mesures affectent les dispositifs de soutien à l’emploi et d’insertion professionnelle, notamment pour les jeunes.