Surprise à l’Assemblée nationale : vendredi, en l’absence notable de nombreux députés macronistes, un amendement porté par La France insoumise (LFI) a été adopté. Cette mesure instaure une nouvelle taxe de 2 % sur les patrimoines supérieurs à un milliard d’euros, touchant les milliardaires français ou étrangers possédant des biens en France. Une initiative inédite, inspirée par l’économiste Gabriel Zucman, qui marque un virage important dans la fiscalité des très grandes fortunes.
Un vote historique et inattendu
Porté par le député Éric Coquerel, l’amendement a été voté avec une large majorité des voix de gauche. Cette « taxe Zucman » vient concrétiser l’idée d’un impôt mondial sur les milliardaires, une proposition que l’économiste français avait formulée lors du sommet du G20 à Rio, en juin dernier. « En 20 ans, ils ont accumulé 1 000 milliards de patrimoine, alors leur prendre 13 milliards pour l’intérêt général et l’écologie, je dis banco ! » a-t-il déclaré sur X (anciennement Twitter), juste après l’adoption du texte.
Ce vote, inattendu à ce stade du débat budgétaire, a été facilité par une absence marquante dans les rangs du camp présidentiel. En effet, plusieurs députés d’Ensemble pour la République (EPR) n’étaient pas présents pour s’y opposer. Une aubaine pour la gauche qui, portée par LFI, n’a pas hésité à faire passer cet amendement.
Le gouvernement critique une taxe « contre-productive »
Du côté du gouvernement, la réaction ne s’est pas fait attendre. Laurent Saint-Martin, ministre du Budget, a fustigé cette taxe qu’il juge dangereuse pour l’économie nationale. Selon lui, elle risquerait d’encourager une fuite des capitaux vers d’autres pays moins sévères. « C’est tout simplement un impôt qui, je pense, n’existe dans aucun autre pays », a-t-il affirmé, ajoutant que cette taxe pourrait compromettre l’attractivité de la France pour les investisseurs internationaux. « Le meilleur moyen de faire fuir ceux qui peuvent investir dans notre pays, c’est exactement celui-là », a-t-il prévenu.
L’argument est toutefois contesté par certains députés de la commission des Finances. Leur président, appuyant la proposition de LFI, a jugé l’argument du gouvernement « difficilement audible pour 95 % de nos concitoyens », rappelant que les milliardaires ont vu leur patrimoine croître de manière exponentielle au cours des deux dernières décennies.
L’échec d’un ISF climatique
Ironie du calendrier, le vote de la « taxe Zucman » intervient quelques minutes seulement après le rejet d’une autre proposition de LFI et du Nouveau Front populaire : un impôt de solidarité sur la fortune (ISF) sous forme d’« ISF climatique ». Cette version actualisée de l’ISF aurait pris en compte l’empreinte carbone des patrimoines, pour un rendement estimé à 15 milliards d’euros, selon la députée écologiste Eva Sas. Cette mesure a été rejetée par la coalition gouvernementale, avec le soutien du Rassemblement national (RN), mais reste un sujet sensible pour de nombreux élus écologistes qui en font une priorité de leur programme fiscal.