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Assemblée nationale : la réforme des exonérations patronales mise en échec en première lecture

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  • L’article 6 du PLFSS 2025, qui visait à réformer les exonérations de cotisations patronales, n’a pas survécu au vote en première lecture à l’Assemblée nationale.
  • Cette mesure, défendue par le gouvernement, devait permettre une redistribution des allègements de cotisations sociales pour encourager la progression salariale.

Les députés de l’Assemblée nationale ont voté la suppression de l’article 6 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025, un coup dur pour le gouvernement qui espérait restructurer les exonérations de cotisations patronales.

Défendu par la ministre du Travail Astrid Panosyan, cet article proposait une refonte radicale visant à limiter et redistribuer les allègements de charges en fonction des niveaux de salaires, notamment pour réaliser des économies de 4 milliards d’euros. Cependant, ce projet, soutenu par la gauche et le Nouveau Front populaire, s’est heurté à une opposition farouche des groupes du « socle commun » — Ensemble pour la République, Droite républicaine et Horizons — ainsi que du Rassemblement national (RN).

Un vote serré dans un climat tendu

Le vote en séance publique s’est révélé particulièrement serré : 170 députés ont voté pour la suppression de l’article, contre 162 qui ont tenté de le maintenir. Ce scrutin reflète les divergences profondes au sein même des groupes censés soutenir le gouvernement. « J’entends les craintes », a déclaré Astrid Panosyan, en appelant cependant les députés à « maintenir l’article dans le projet de loi et à l’améliorer » à travers la navette parlementaire avec le Sénat. Elle justifie cette réforme par la nécessité de lutter contre des « trappes à bas salaires » et les « trappes à inactivité », deux effets pervers qui, selon elle, freinent l’évolution des revenus en France.

Laurent Saint-Martin, ministre du Budget et des Comptes publics, a appuyé sa collègue en soulignant l’importance de proposer un « chemin de freinage de la dépense publique » pour éviter une concentration excessive des salaires autour du SMIC. « Les exonérations ont connu une accélération très rapide ces quatre dernières années, atteignant +20 milliards d’euros », a-t-il rappelé, justifiant la nécessité de revoir leur structure pour aller vers une économie moins dépendante du SMIC. Selon une étude récente de la Dares, près de 17 % de la population active en France est aujourd’hui rémunérée au niveau du SMIC.

Une réforme contestée : coût du travail et compétitivité en question

Face à cette ambition gouvernementale, les députés du socle commun et du Rassemblement national ont exprimé des réserves importantes. Pour eux, cette refonte des exonérations de cotisations représente un risque significatif pour la compétitivité des entreprises et l’emploi. Gérald Darmanin, figure d’Ensemble pour la République, a dénoncé une réforme qui entraînerait « une augmentation du coût du travail, au pire moment pour notre économie ». À sa suite, Laurent Wauquiez, président de la Droite républicaine, a estimé que les allègements de charges sont essentiels pour « bénéficier au travail et aux salaires », pointant ainsi la nécessité de maintenir un environnement favorable aux entreprises.

« Arrêtez de dire que ce sont des économies, ce sont des augmentations de prélèvements obligatoires », a martelé Gérald Darmanin, en exhortant le gouvernement à relancer la réforme de l’assurance chômage plutôt que de peser davantage sur les entreprises.

Une gauche divisée mais en soutien de la réforme

Pourtant, la gauche et le groupe du Nouveau Front populaire se sont unis pour soutenir le maintien de cet article, tout en dénonçant son insuffisance. « Les aides publiques ne sont pas attribuées à vie », a souligné Yannick Monnet, député communiste du groupe Gauche démocrate et républicaine. De son côté, le socialiste Jérôme Guedj a rappelé que les exonérations de cotisations patronales, qui pesaient « 37 milliards d’euros en 2014 », ont atteint aujourd’hui près de 80 milliards. Pour eux, cette réforme constitue une avancée nécessaire vers une meilleure distribution des allègements fiscaux.

Les débats ont également mis en lumière un gouvernement en « splendide isolement », selon les mots de Jérôme Guedj, dont les propositions rencontrent l’opposition des groupes censés le soutenir dans un hémicycle en apparence « à front renversé ».

Une alliance inattendue

L’opposition à l’article 6 a ainsi fédéré des groupes souvent antagonistes autour d’une cause commune. « Vous avez vos troupes qui se vengent d’une mesure totalement inefficace parce que brutale », a lancé Hervé de Lépinau (Rassemblement national) au gouvernement, accentuant le malaise des élus au sein du « socle commun ». Laure Lavalette, députée RN, a également fustigé une réforme qui, selon elle, « menace directement l’emploi » et les petites et moyennes entreprises.

La suppression de l’article 6 ne présage cependant pas de la version finale du texte, le PLFSS devant encore être examiné par le Sénat. Astrid Panosyan a insisté sur le potentiel d’amélioration du projet grâce à la navette parlementaire, espérant ainsi apaiser les inquiétudes des députés quant aux impacts de la réforme.

 

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