L’Assemblée nationale a franchi un cap en votant, ce lundi 4 novembre, deux amendements imposant l’affichage obligatoire du Nutri-Score sur les denrées alimentaires et dans les publicités. Ce dispositif, bien qu’adopté en première lecture, se heurte à l’opposition du gouvernement, qui invoque des contraintes européennes.
L’Assemblée nationale a voté, ce lundi 4 novembre, en première lecture du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025, deux amendements qui imposeraient l’affichage obligatoire du Nutri-Score sur les denrées alimentaires et dans les publicités alimentaires. Cette décision marque une avancée pour les partisans de ce dispositif, lancé en France en 2017, qui vise à informer le consommateur sur la qualité nutritionnelle des produits. Cependant, le gouvernement a immédiatement exprimé son désaccord, estimant que cette obligation relève de la réglementation européenne.
Un Nutri-Score imposé ?
Le Nutri-Score, étiquetage qui attribue une note de A à E aux produits alimentaires en fonction de leur qualité nutritionnelle, est facultatif en France depuis six ans. L’amendement adopté ce lundi pourrait changer la donne, rendant obligatoire son affichage sur toutes les denrées alimentaires en vente. Un second amendement prévoit d’étendre cette obligation aux publicités pour ces produits.
Pour Cyrille Isaac-Sibille, député des Démocrates et auteur des deux amendements, ce dispositif répond à une urgence de santé publique. « Les maladies chroniques augmentent de 4 % chaque année (…) c’est pour cela que notre système de santé est en danger », a déclaré le député dans l’hémicycle, rappelant que la démarche vise non pas à restreindre certains aliments, mais à mieux informer les consommateurs. « Il ne s’agit pas de demander aux Français de renoncer à leurs habitudes, mais de les sensibiliser sur les impacts nutritionnels de leur consommation », a-t-il ajouté dans son exposé des motifs.
Des soutiens déterminés face aux réserves gouvernementales
Les amendements ont reçu le soutien de plusieurs députés de gauche et des écologistes. Jérôme Guedj (PS), Hadrien Clouet (LFI) et Sabrina Sebaihi (EELV) ont tous salué l’initiative, insistant sur le rôle de ce label pour encourager les producteurs à revoir la composition de leurs produits. « L’objectif du Nutri-Score est de pousser les industriels à réduire les quantités de sucre, de sel et de graisses saturées », a souligné Mme Sebaihi.
Mais l’enthousiasme des parlementaires est loin d’être partagé par le gouvernement. La ministre de la Santé, Geneviève Darrieussecq, a rappelé que le Nutri-Score relève d’une initiative européenne et qu’il n’est pas possible de le rendre obligatoire de manière unilatérale. « Le Nutri-Score est un élément important, mais la réglementation actuelle ne permet pas de le rendre obligatoire », a-t-elle affirmé, tout en se disant favorable à une évolution de son algorithme, actuellement en discussion au niveau européen.
Des critiques autour de l’impact sur les produits locaux
Dans les rangs de l’opposition de droite, des voix discordantes se sont également fait entendre. Joëlle Mélin (RN) et Thibault Bazin (LR) se sont montrés sceptiques quant aux effets de cette obligation sur certains produits traditionnels français. Bazin, député de Meurthe-et-Moselle, a ainsi souligné que certains produits de terroir pourraient être sévèrement notés, malgré leur place dans le patrimoine culinaire français. « Si on appliquait le Nutri-Score aux produits de nos régions, ils finiraient souvent classés en D ou E », a-t-il déclaré.
Un parcours législatif encore incertain
L’avenir de ces amendements est pour le moins incertain. Le PLFSS doit encore être adopté en séance finale, une étape où le gouvernement pourrait avoir recours à l’article 49.3 de la Constitution, permettant d’imposer le texte sans vote. Si tel est le cas, le gouvernement pourrait décider de retirer ces amendements, réaffirmant ainsi son opposition à leur application unilatérale en France.
Le texte doit également être examiné par le Sénat, où il pourrait être modifié ou rejeté. Mais pour les partisans du Nutri-Score obligatoire, l’adoption de ces amendements est déjà une victoire symbolique dans la lutte pour une alimentation plus transparente.