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Accord UE-Mercosur : la fronde des députés français pour protéger l’agriculture et l’environnement

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  • Alors que les négociations de l’accord UE-Mercosur progressent, l’opposition des députés français prend de l’ampleur.
  • Dans un appel transpartisan, des députés de tous bords appellent le gouvernement à s’opposer fermement à un traité qu’ils jugent « contraire aux intérêts des producteurs et à la souveraineté alimentaire ».

Une fronde politique transpartisane prend de l’ampleur en France contre l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur. Mardi soir, une proposition de résolution européenne a été adoptée en commission des Affaires européennes à l’Assemblée nationale, avec une quasi-unanimité : plus de 70 députés l’ont signée. Ce texte, initié par le député socialiste Dominique Potier, appelle le gouvernement à user de tout son poids pour bloquer un accord jugé « contraire à la trajectoire climatique, aux intérêts de nos producteurs, à notre souveraineté alimentaire ».

Des standards européens à défendre

Dominique Potier, promoteur de la résolution adoptée mardi, a présenté un texte structuré autour de cinq propositions pour encadrer le libre-échange, dont le renforcement des « mesures miroirs ». Ce dispositif imposerait aux exportateurs de respecter les standards européens en matière de sécurité sanitaire et environnementale, protégeant ainsi les agriculteurs européens de la concurrence déloyale. « Ce que nous demandons, ce sont des normes égales pour tous », a expliqué Sandrine Le Feur, députée Renaissance et agricultrice, présidente de la commission du Développement durable à l’Assemblée nationale. Elle salue cette mobilisation « transpartisane » qui vise à défendre les intérêts de l’agriculture française.

Un rejet massif et transpartisan

De plus, 209 députés issus de l’ensemble de l’échiquier politique, des écologistes aux Républicains, ont publié une tribune lundi 4 novembre pour exiger du gouvernement qu’il refuse la ratification de cet accord, conclut en 2019 entre l’UE et le Mercosur. « L’accord, négocié par la Commission européenne, trahit deux fois ce que doit être l’Union européenne. Il trahit l’ambition d’une élévation des standards environnementaux, sociaux, sanitaires. Il trahit aussi l’engagement pour la souveraineté alimentaire de notre continent », affirment ces élus.

La colère des députés français est amplifiée par les conséquences désastreuses que cet accord pourrait avoir sur l’agriculture hexagonale. Alors que la France a perdu 100 000 exploitations agricoles en dix ans et qu’elle risque de subir des pertes similaires dans la prochaine décennie, les élus estiment que cet accord ferait de l’agriculture française une simple variable d’ajustement au service d’intérêts commerciaux. « Cet accord reviendrait à sacrifier nos valeurs profondes à des intérêts commerciaux et géopolitiques court-termistes », concluent les signataires.

Cet accord permettrait notamment l’importation massive de produits agricoles du Mercosur vers l’Europe, comme « du poulet dopé aux antibiotiques, du bœuf élevé sur fond de déforestation, et du maïs traité à l’atrazine », substances et pratiques interdites dans l’UE. « Nous refusons d’ouvrir les marchés européens à de telles productions », ajoutent les parlementaires, déplorant l’absence de garanties solides dans l’accord en matière environnementale et sanitaire.

Un soutien du gouvernement, mais des doutes subsistent

Le président Emmanuel Macron a, pour sa part, déclaré mi-octobre que l’accord n’était « pas acceptable en l’état », mais certains députés doutent de la sincérité de cet engagement. François Ruffin, député de La France insoumise, s’est montré sceptique quant à la réelle volonté du chef de l’État d’opposer un veto définitif. « Je crois que dans la durée, Emmanuel Macron est un partisan du libre-échange », a-t-il affirmé. « Je crois qu’il donne des gages parce qu’il y a une opinion publique qui est très défavorable (…) mais qu’en vérité, il ne mettra pas tout son pouvoir dans la balance pour aller contre ce qui est le fond de ce qu’il fait et pense depuis 20 ans. »

Au sein du gouvernement, plusieurs voix se sont élevées pour exprimer une opposition ferme. La ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, a ainsi déclaré mardi qu’elle était « absolument et fondamentalement hostile » au projet d’accord. Elle a vivement dénoncé les conséquences économiques que cet accord pourrait avoir sur les exploitations françaises : « Les productions que vont nous apporter les pays du Mercosur vont déstabiliser en profondeur nos propres productions. » Selon elle, « l’agriculture ne peut pas être la variable d’ajustement de tous les accords internationaux que l’Europe conclut ». Son homologue au Commerce extérieur, Sophie Primas, avait exprimé une opposition similaire, jugeant que les conditions fixées par Paris n’étaient toujours « pas satisfaites ».

Vers un Blocus Français ?

Alors que l’UE est divisée entre pays favorables à l’accord et ceux qui y sont opposés, la France pourrait bien jouer un rôle clé dans son rejet. À présent, la question reste de savoir si le gouvernement français, soutenu par une opposition transpartisane inédite, osera effectivement s’opposer à l’accord au sein du Conseil européen.

 

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