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Bruno Le Maire devant le Sénat : « Le ministre des Finances ne décide pas de tout, tout seul dans son bureau de Bercy »

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Face à une situation budgétaire dégradée, Bruno Le Maire s’est expliqué ce jeudi devant la commission des finances du Sénat, abordant transparence, arbitrages et partage des responsabilités.

Ce jeudi matin, l’ancien ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a été auditionné par la commission des finances du Sénat. À la suite d’une détérioration marquée des prévisions budgétaires pour 2024, le Sénat cherche des réponses sur les choix qui ont mené à une estimation du déficit de 6,1 %, bien au-delà des 4,4 % initialement fixés dans la loi de finances.

En mai dernier, face aux sénateurs, Bruno Le Maire s’était montré ferme : « Une erreur pareille ne peut se reproduire deux fois », avait-il affirmé alors que la dérive des comptes publics pour l’année 2023 commençait à apparaître. Pourtant, cinq mois plus tard, le déficit s’est encore creusé, atteignant une estimation de 6,1 % pour 2024.

Cette audition a pour objectif est de comprendre la dégradation des finances publiques depuis 2023, son suivi par l’administration et le gouvernement ( capture d’écran de la vidéo retransmise en direct par Public Senat)

Une transparence budgétaire accrue demandée

Dans son discours d’ouverture, Bruno Le Maire a plaidé pour un renforcement des liens entre le gouvernement et les commissions parlementaires des finances. « Sans doute qu’un travail beaucoup plus étroit entre législatif et exécutif est salutaire », a-t-il souligné, avant de proposer une « méthode de travail » inédite pour garantir la transparence des prévisions économiques.

Selon lui, il serait bénéfique de transmettre « en temps réel les budgets d’été, les budgets d’hiver, et de transmettre toutes les notes de prévision du Trésor, de la Direction générale des finances publiques, aux seuls deux présidents des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat, et aux deux seuls rapporteurs généraux. » Il qualifie ce changement de « radical », une manière pour le ministre d’affirmer sa volonté de transparence dans la gestion des finances publiques.

Des arbitrages politiques difficiles

Bruno Le Maire a également clarifié les mécanismes de prise de décision au sein du gouvernement. « Le ministre des Finances ne décide pas de tout, tout seul dans son bureau de Bercy », a-t-il affirmé, évoquant les arbitrages budgétaires entre le ministère de l’Économie et l’exécutif. Il reconnaît avoir remporté certaines batailles, comme la réforme de l’assurance chômage qu’il considère comme « totalement essentielle pour notre pays ».

En revanche, il admet que d’autres propositions d’économies, telles que la moindre revalorisation des prestations sociales, n’ont pas été retenues. « Nous avions proposé la moindre revalorisation des prestations sociales et des retraites, parce qu’il me semblait juste que les retraités et les bénéficiaires des prestations sociales soient traités de la même manière que les salariés. Nous n’avons pas été suivis sur ce point », a-t-il précisé.

Une responsabilité partagée

Pour Bruno Le Maire, la responsabilité de la dégradation budgétaire ne repose pas uniquement sur son ministère, mais sur l’ensemble de l’exécutif. Il rejette l’idée qu’il aurait eu le contrôle total de la situation, expliquant avoir dû défendre ses positions sans pour autant avoir toujours le dernier mot. « Est-ce que j’ai gagné tous les arbitrages dans ces réunions ? Non », concède-t-il.

Face aux critiques, il tient à rappeler que les prévisions budgétaires ont été affectées par des facteurs externes imprévisibles. « Des recettes plus faibles que ce que nous pouvions attendre, une croissance qui donne moins de recettes fiscales et des modèles de prévision de recettes qui se sont plantés », a-t-il indiqué. Selon lui, cette imprécision, combinée à des modèles de prévision devenus moins fiables après la pandémie, explique une grande partie du déficit cumulé de 41 milliards d’euros sur les années 2023 et 2024.

« Il n’y a eu ni faute, ni dissimulation, ni volonté de tromperie »

Accusé par certains d’avoir caché la gravité de la situation, Bruno Le Maire s’est défendu vigoureusement. « Il n’y a eu ni faute, ni dissimulation, ni volonté de tromperie », a-t-il affirmé. Il rappelle que les prévisions de recettes fiscales sont élaborées de manière indépendante par les services de Bercy et son cabinet, afin d’éviter toute manipulation. « On ne peut pas m’expliquer que 80 % de la dégradation des finances publiques vient d’une mauvaise évaluation des recettes à laquelle je ne participe pas, puis me dire ensuite ‘M. Le Maire, vous avez fait n’importe quoi' », a-t-il ajouté, soulignant l’importance de maintenir cette « étanchéité totale ».

Accusé par certains d’avoir caché la gravité de la situation, Bruno Le Maire s’est défendu vigoureusement. « Il n’y a eu ni faute, ni dissimulation, ni volonté de tromperie », a affirme Bruno Le Maire lors de son audition ( image extraite d’une vidéo )

Une critique de la prévision de croissance politique

Enfin, Bruno Le Maire s’est opposé à une proposition de Pierre Moscovici, président du Haut Conseil des finances publiques (HCFP), visant à confier les prévisions de croissance à son institution. « Il n’est pas de bonne règle d’expliquer que la croissance c’est politique et que tout le reste est technique », a rétorqué Jean-François Husson, rapporteur général du Sénat. En réponse, Bruno Le Maire a défendu le statu quo, déclarant qu’il n’était « pas favorable » à une telle réforme, car il estime que la croissance doit rester un indicateur qui bénéficie d’un suivi diversifié, alliant expertise technique et décisions politiques.

« Je conteste ce chiffre de 6,1 % (…) c’est le choix du gouvernement actuel »

Avant de conclure, l’ancien ministre a tenu à clarifier son désaccord avec la prévision actuelle du déficit pour 2024. « Je conteste ce chiffre de 6,1 % (…) c’est le choix du gouvernement actuel », a-t-il affirmé, ajoutant qu’il aurait été possible de viser un déficit plus proche de 5,5 % avec des « mesures de redressement plus vigoureuses ». Bruno Le Maire déplore ce qu’il perçoit comme une instrumentalisation du déficit à des fins politiques, affirmant que son gouvernement avait pris des « mesures courageuses » pour maintenir le déficit sous contrôle.

Dans un contexte économique incertain, Bruno Le Maire plaide pour une gestion des finances publiques plus collaborative et transparente. Il insiste sur la responsabilité partagée des dérives budgétaires et réaffirme l’importance d’un dialogue renforcé entre le gouvernement et le Parlement.

 

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