- L’élection de Donald Trump ravive les doutes sur la fiabilité de l’alliance transatlantique et pousse les dirigeants européens à s’interroger sur l’indépendance de leur défense.
- Pour certains leaders européens, il est temps de prendre en main la sécurité du continent et de réduire une dépendance devenue trop risquée.
L’élection de Donald Trump a relancé le débat sur l’autonomie de la défense stratégique européenne, un sujet épineux qui divise les leaders du Vieux continent. Alors que le président américain critique sévèrement l’OTAN et exige que chaque pays membre consacre 2 % de son PIB à la défense, les pays européens se trouvent face à un choix stratégique : renforcer leur propre défense ou risquer de voir la protection américaine se retirer. Face aux interrogations croissantes, les dirigeants européens réagissent et appellent à un « sursaut » pour défendre leurs intérêts.
L’OTAN, une alliance remise en cause par Trump
Depuis ses premiers discours, Donald Trump n’a pas hésité à critiquer l’OTAN, organisation de défense collective créée en 1949, qu’il accuse de reposer sur une répartition inéquitable des dépenses militaires. « Vous n’avez pas payé ? Vous êtes des mauvais payeurs », déclarait le président lors d’un meeting en Caroline du Sud, en référence aux membres qu’il considère comme insuffisamment engagés. « Non, je ne vous protégerai pas », menaçait-il, rappelant que selon lui, l’engagement des États-Unis ne doit pas être acquis pour ceux qui « ne paient pas leur part ».
Emmanuel Macron : « Est-on prêt à défendre l’intérêt des Européens ? »
En visite à Budapest ce jeudi pour un sommet européen, Emmanuel Macron n’a pas tardé à réagir. Face à l’élection de Trump, il invite les pays européens à repenser leur approche de la défense. « J’ai eu l’occasion d’avoir le président-élu Donald Trump, je l’ai félicité », déclare-t-il avant de lancer un appel à la mobilisation : « Il va défendre l’intérêt des Américains, c’est légitime. Est-on prêt à défendre l’intérêt des Européens ? C’est notre priorité. Cela ne doit être ni dans un trans-atlantisme naïf, ni dans la remise en cause de nos alliances, ni dans un nationalisme étriqué. »
Pour Macron, cette élection marque un « moment de l’histoire décisif ». Dans un discours devant ses homologues européens, il pose la question cruciale : « Voulons-nous lire l’histoire écrite par d’autres ou voulons-nous écrire l’histoire ? » Le président français rappelle ainsi que l’Europe dispose de systèmes de défense sophistiqués et d’économies solides : « Nous n’avons pas à déléguer notre sécurité aux Américains », martèle-t-il, pressant les Européens de reprendre en main leur destin.
Thierry Breton : « Le retour de Trump doit être l’occasion d’un sursaut »
Pour Thierry Breton, ancien commissaire européen, la réélection de Trump à la Maison Blanche représente un signal d’alarme. Lors d’une interview ce jeudi sur France Inter, il appelle les dirigeants européens à tirer parti de cette « opportunité » pour faire face à la dépendance des États-Unis en matière de défense. « La quasi-totalité des États membres de l’UE dépendent aujourd’hui uniquement de l’OTAN, donc des États-Unis », rappelle-t-il, pointant la « vulnérabilité » de l’Europe et l’importance d’une action rapide.
Selon Breton, un retour de Trump à la Maison Blanche doit être « l’occasion d’un sursaut ». Pour lui, seule une véritable défense européenne peut assurer l’indépendance et la sécurité des pays du continent. Ce réveil pourrait passer par une coopération militaire accrue entre les États membres, une idée qui gagne du terrain dans plusieurs capitales européennes.
Raphaël Glucksmann : « Le parapluie américain peut se refermer brutalement »
De son côté, le député européen Raphaël Glucksmann ne cache pas son inquiétude quant à la sécurité du continent. Dans une interview à L’Express, il déplore le manque de réaction des dirigeants européens et appelle à une mobilisation générale des capacités industrielles pour renforcer la défense européenne. « En Europe, nos leaders sont aphasiques », affirme-t-il, fustigeant leur inaction.
Raphaël Glucksmann, fondateur du mouvement Place Publique, est depuis longtemps un fervent défenseur d’une Europe plus indépendante sur le plan militaire. Selon lui, cette autonomie passe par une relance de l’industrie de l’armement et une préparation des infrastructures. « Ce n’est pas du bellicisme que de prendre au sérieux la défense de l’Europe », précise-t-il, avant d’ajouter : « Pour la première fois depuis 1945, le parapluie américain sous lequel nous somnolions peut se refermer brutalement. » Une remarque lourde de sens, qui appelle l’Europe à se préparer à un changement majeur dans l’équilibre des alliances.
Un défi complexe mais crucial pour l’autonomie du continent
Malgré ces appels à l’action, la création d’une défense européenne commune n’est pas sans obstacles. Les différences de priorités entre États membres, les disparités budgétaires et la complexité des structures de l’OTAN compliquent les avancées. Cependant, des initiatives existent, comme la Coopération structurée permanente (PESCO) et le Fonds européen de défense, qui cherchent à harmoniser les efforts militaires au sein de l’Union.
La réélection de Donald Trump pourrait -elle être le catalyseur qui pousse les pays européens à accélérer leurs efforts en faveur d’une autonomie stratégique réelle ? Une prise conscience se traduira t-elle par des actes concrets dans un futur proche? Affaire à suivre!
