Des tracteurs sur les ronds-points, des cortèges en colère, et un message clair : les agriculteurs français s’opposent fermement au traité Mercosur et réclament une meilleure reconnaissance de leur rôle dans l’économie nationale.
Les tracteurs sont de retour sur les routes. Moins d’un an après un premier mouvement de protestation, les agriculteurs français se mobilisent à nouveau contre le projet d’accord de libre-échange avec le Mercosur et pour alerter sur une situation qu’ils jugent « dramatique« . Ce lundi 18 novembre, les syndicats agricoles intensifient leurs actions dans tout le pays.
Dès l’aube, des rassemblements ont eu lieu en Vendée et dans les Yvelines, avant d’être suivis par d’autres manifestations à travers la France. Selon Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, pas moins de « 82 actions » sont prévues jusqu’à mardi. Les agriculteurs ciblent en priorité les préfectures, sous-préfectures et points stratégiques comme les ronds-points symboliques et les grandes avenues.
« Le but n’est pas de bloquer ou d’ennuyer les Français, mais de leur faire passer le message que la situation que vit l’agriculture aujourd’hui est une situation d’urgence », a déclaré Arnaud Rousseau dimanche sur BFMTV.
En parallèle, certains rassemblements plus spectaculaires ont eu lieu. Dimanche soir, des cortèges d’agriculteurs se sont rendus près de la base aérienne de Villacoublay, à proximité de Paris, pour dénoncer le projet Mercosur.
Le Mercosur, au cœur des inquiétudes
Les protestations agricoles visent principalement le Mercosur, ce traité de libre-échange entre l’Union européenne et plusieurs pays d’Amérique du Sud (Brésil, Argentine, Paraguay, Uruguay). Ce projet, encore en négociation, prévoit une ouverture accrue du marché européen aux produits agricoles sud-américains.
Pour les agriculteurs français, l’accord menace leur survie face à une concurrence qu’ils jugent déloyale. « Les produits agricoles ne sont pas des produits comme les autres. On ne peut pas mettre l’élevage européen en concurrence avec l’élevage brésilien qui ne dispose pas des mêmes normes », a souligné Sandrine Rousseau, députée du Nouveau Front populaire, sur LCI.
Emmanuel Macron veut temporiser
Depuis Buenos Aires, où il est en visite officielle, le président Emmanuel Macron a tenu à rassurer les agriculteurs. « La France ne signera pas ce traité en l’état« , a-t-il affirmé lundi. « Nous ne croyons pas au pré-accord tel qu’il a été négocié. D’abord parce qu’il ne prend pas en compte les évolutions que nous avons faites sur nos propres marchés. »
Le chef de l’État a insisté sur la nécessité de protéger le modèle agricole français : « Je ne veux pas qu’on cède de notre souveraineté alimentaire. L’agriculture française et européenne n’est pas un facteur d’ajustement à de mauvais accords. »
Mais les propos présidentiels peinent à dissiper les inquiétudes. Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a récemment déclaré que les négociations sur le Mercosur étaient « dans la dernière ligne droite« , suscitant des critiques virulentes en France.
« Il faut dire à la Commission européenne que, s’ils valident le Mercosur, c’est un coup de poignard dans le dos de la France, dans le dos de l’agriculture », a dénoncé Xavier Bertrand sur TF1. Il appelle à une « minorité de blocage » avec d’autres pays européens, comme l’Italie ou la Pologne.
Une agriculture sous pression
Au-delà du Mercosur, les agriculteurs pointent du doigt d’autres défis : des revenus insuffisants, des récoltes catastrophiques cette année, et les ravages causés par des maladies animales émergentes.
Emmanuel Macron a reconnu ces difficultés : « Les récoltes très mauvaises et une réglementation trop importante alimentent la colère des agriculteurs », a-t-il expliqué. « Le gouvernement accompagne, comme tous les gouvernements précédents, les agriculteurs pour qu’ils soient indemnisés et qu’on puisse vacciner à chaque fois. »
Un cri d’alarme pour l’avenir de l’agriculture
Les agriculteurs appellent à une prise de conscience nationale sur l’importance de leur métier. « On veut produire en Européens, et particulièrement en Français, ce qui est important pour notre alimentation », a insisté Emmanuel Macron.
Si le Mercosur cristallise les tensions, les syndicats agricoles réclament une refonte globale du modèle agricole français, avec des règles équitables et un soutien accru face aux crises sanitaires et climatiques.
« La situation est dramatique« , martèle Arnaud Rousseau. « Mais nous voulons que les Français comprennent : nous nous battons pour leur alimentation et pour préserver notre souveraineté alimentaire. »