- Sous la pression croissante du Rassemblement national et d’une opposition de plus en plus virulente, Michel Barnier tente de préserver sa majorité en lâchant du lest sur plusieurs dossiers sensibles.
- Concessions sur l’électricité, ajustements sur l’Aide médicale d’État et revalorisation des retraites. Mais ces compromis suffiront-ils à apaiser les débats l’Assemblée ?
Le gouvernement de Michel Barnier tente de désamorcer une crise politique majeure autour du budget 2025. Face à la menace d’une motion de censure portée par le Rassemblement national (RN), plusieurs concessions ont été annoncées. Mais ces gestes suffiront-ils à apaiser les tensions, ou s’agit-il d’un simple répit avant un affrontement inévitable ? Retour sur une semaine où le pouvoir a joué son avenir.
Une taxe sur l’électricité revue à la baisse
C’est sans doute l’annonce la plus marquante. Pour protéger le pouvoir d’achat des Français, le Premier ministre a confirmé que la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) n’augmentera pas au-delà des niveaux d’avant 2021. Cette décision, qui devrait aboutir à une baisse des prix de l’électricité de 14 % en 2025, répond à une revendication clé du RN.
Pourtant, Maud Bregeon, porte-parole du gouvernement, a tenu à préciser vendredi sur France 2 que cette mesure ne constitue pas une concession à l’extrême droite : « C’est une demande portée par presque tous les groupes parlementaires », a-t-elle expliqué. Une tentative de dépolitiser une annonce qui intervient à un moment particulièrement tendu pour l’exécutif.
Réduction de l’AME : un sujet épineux sur l’immigration
Autre sujet épineux : l’Aide médicale d’État (AME). Michel Barnier a annoncé une réforme visant à réduire sensiblement les soins pris en charge pour les étrangers en situation irrégulière. Le Premier ministre souhaite ainsi répondre aux critiques sur des abus présumés, une thématique récurrente pour le RN et une partie de la droite.
Cette réforme tombe à pic alors que le Sénat doit examiner ce dispositif lundi. Mais des organisations humanitaires, comme Médecins du Monde, dénoncent une approche démagogique. Selon Matthias Thibeaud, référent santé de l’ONG : « Les personnes sous AME n’ont déjà pas accès à de nombreux soins essentiels. Réduire ce dispositif mettra en danger des vies. »
Les allègements de charges partiellement préservés
Pour calmer les inquiétudes des entreprises, notamment des petites et moyennes entreprises (PME), le gouvernement a également fait un geste en préservant les allègements de charges pour les salaires jusqu’à 2,25 fois le SMIC. Cette décision, prise après consultation des représentants patronaux, limite l’impact budgétaire à 1,6 milliard d’euros, bien loin des 4 milliards initialement envisagés.
Si cette mesure a été saluée par une partie des députés macronistes, le RN reste insatisfait. Le parti de Marine Le Pen continue de réclamer un soutien accru pour les très petites entreprises (TPE) et les indépendants.
Retraites : une revalorisation jugée insuffisante
Sur le dossier des retraites, le gouvernement a annoncé un compromis. Une revalorisation partielle de 0,8 % interviendra dès janvier 2025, suivie d’un complément en juillet pour atteindre une augmentation totale de 1,6 % pour les pensions inférieures à 1 500 euros brut.
Une mesure que le RN juge insuffisante. « Il s’agit encore d’une désindexation injuste par rapport à l’inflation », a critiqué Gaëtan Dussausaye, porte-parole du RN, en appelant le gouvernement à revoir sa copie d’ici lundi.
Une motion de censure imminente ?
Malgré les concessions, le RN maintient la pression. « À ce stade, nous voterons une motion de censure, » a assuré Sébastien Chenu, vice-président du parti, vendredi sur Franceinfo. Il accuse le gouvernement de bricoler des solutions sans répondre aux véritables enjeux des Français. De son côté, Michel Barnier tente de rassembler sa majorité autour d’un budget remanié à la hâte, tout en espérant éviter une fracture fatale au Parlement.
Des concessions qui fragilisent l’exécutif
En multipliant les gestes en direction de ses opposants, Michel Barnier s’expose à des critiques venant de tous bords. À droite, on fustige des mesures jugées tardives ou insuffisantes. À gauche, on dénonce un alignement idéologique dangereux sur les thèmes de l’extrême droite. Quant à l’opinion publique, elle attend des résultats concrets, notamment sur la baisse du coût de la vie.
Alors que l’Assemblée se prépare à une semaine décisive, le gouvernement joue son avenir sur un fil. Si les concessions n’apaisent pas le RN, la menace d’une motion de censure pourrait se concrétiser, plongeant la France dans une nouvelle crise politique. Le budget 2025, bien plus qu’un simple document financier, est devenu le symbole d’un bras de fer qui redéfinira les équilibres du pouvoir.