L’accord UE-Mercosur, fruit de longues discussions, suscite autant d’espoirs économiques que de craintes pour l’agriculture européenne et l’environnement, exacerbant les tensions politiques en France et au sein de l’Union européenne.
Après 25 ans de négociations, l’Union européenne et le Mercosur ont conclu un accord de libre-échange. L’annonce, faite par Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, est présentée comme un jalon historique. Mais si elle salue une « victoire pour l’Europe », les réactions en France, notamment, oscillent entre scepticisme et indignation.
« Une nouvelle histoire » pour le commerce international
« Nous avons conclu les négociations pour l’accord UE-Mercosur. C’est le début d’une nouvelle histoire », a déclaré Ursula von der Leyen lors d’une conférence de presse conjointe avec les dirigeants des pays du Mercosur. « Je me réjouis maintenant d’en discuter avec les pays européens. »
Cet accord, destiné à renforcer les relations commerciales entre deux marchés représentant plus de 700 millions de consommateurs, est vu comme une opportunité pour stimuler la croissance économique. Le chancelier allemand Olaf Scholz a salué cette avancée : « L’accord politique entre les pays du Mercosur et l’UE est là. Un obstacle important a été levé. Plus de 700 millions de personnes pourront bénéficier d’un marché libre, de plus de croissance et de compétitivité. »
Selon la Commission européenne, le texte inclut des garanties pour répondre aux inquiétudes du secteur agricole européen. « Nous écoutons les préoccupations de nos agriculteurs et nous agissons en conséquence. Cet accord inclut des garanties solides pour protéger nos moyens de subsistance », a assuré Mme von der Leyen.
En France, colère et désillusion
En France, l’annonce de cet accord a provoqué un tollé. Sophie Primas, ancienne ministre déléguée au Commerce extérieur, a vivement réagi : « Ce qu’il se passe à Montevideo n’est pas une signature de l’accord mais simplement la conclusion politique de la négociation. Celle-ci n’engage que la Commission, pas les États membres. »
Du côté de l’opposition, les critiques sont encore plus virulentes. Marine Le Pen a dénoncé un « coup de poignard dans le dos du peuple français », estimant que « la Commission européenne s’essuie les pieds sur le vote souverain des députés ».
À gauche, la colère gronde également. L’eurodéputée Manon Aubry (LFI) fustige un accord qui, selon elle, représente « un coup de poignard dans le dos des agriculteurs », un « danger pour notre santé » et une « catastrophe écologique ». Jean-Luc Mélenchon, leader de la France insoumise, y voit une véritable trahison : « Pendant que Macron joue au Monopoly politique, le gouvernement allemand se réjouit de la forfaiture de von der Leyen : elle a signé le traité de libre-échange Mercosur en Uruguay ! La France sort de l’Histoire. »
Pour Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste, l’accord représente une « trahison ». Il accuse la Commission européenne de sacrifier l’agriculture européenne au profit d’un traité qui, selon lui, bénéficie uniquement aux grandes multinationales.
Un débat qui divise l’Union européenne
Cet accord met en lumière les fractures au sein de l’Union européenne. Tandis que certains États membres, comme l’Allemagne, applaudissent la conclusion de cet accord, d’autres, comme la France, y voient une menace pour leur souveraineté alimentaire et leurs agriculteurs.
La porte-parole du gouvernement français, Maud Bergeron, s’est exprimée en ces termes : « Cet accord entre la Commission et le Mercosur est conclu au mépris de notre souveraineté agricole et des exigences environnementales. Le bras de fer avec la Commission doit être plus que jamais maintenu. »
Pour certains élus, cet accord illustre l’affaiblissement de la position française dans l’Union européenne. Gabriel Attal, député des Hauts-de-Seine, a déclaré : « Déstabilisé faute de gouvernement stable, la France pourrait voir son influence affaiblie pour s’opposer au Mercosur. Ce risque est en train de devenir réalité. »