François Bayrou, président du MoDem et maire de Pau, a été nommé Premier ministre par Emmanuel Macron ce vendredi 13 décembre. À 73 ans, cet homme politique chevronné accède à Matignon dans un contexte tendu, marqué par une Assemblée nationale sans majorité et une fracture politique profonde. Sa nomination, qualifiée par certains d’aboutissement, suscite autant d’espoirs que de critiques.
Un contexte politique sous haute tension
La chute du gouvernement précédent, entraînée par une motion de censure adoptée par 331 députés, a plongé le pays dans une crise institutionnelle. Neuf jours plus tard, Emmanuel Macron a choisi François Bayrou pour tenter de former un gouvernement d’unité.
« Le patron du MoDem, premier allié du chef de l’État et figure du centre, aura la lourde tâche de former un gouvernement susceptible de survivre à la menace de censure d’une Assemblée nationale sans bloc majoritaire, et de faire adopter un budget dont la France est pour l’instant privée pour 2025 », indique la présidence dans un communiqué.
Bayrou face à un défi colossal
Dans ses premières déclarations, François Bayrou a mis l’accent sur la nécessité de rassembler : « Je pense que tout le monde mesure la difficulté de la tâche, tout le monde se dit qu’il y a un chemin à trouver, réunir les gens plutôt que les diviser. » Pour lui, l’objectif est clair : « La réconciliation est nécessaire. Quand vous faites un chemin et que vous savez où vous allez, il n’y a pas une minute de perdue, pas une minute désagréable. »
Des réactions contrastées dans la classe politique
La nomination de François Bayrou n’a laissé personne indifférent. « Félicitations à François Bayrou dont je connais les qualités et l’engagement au service des Français. Dans cette période grave pour la France et pour l’Europe, tous mes vœux personnels et amicaux pour son action à la tête du gouvernement. », a réagi Gabriel Attal, ancien Premier ministre Gabriel Attal
Marine Le Pen, cheffe du Rassemblement national, a quant à elle adressé une mise en garde : « Nous lui demandons d’entreprendre ce que son prédécesseur n’a pas voulu faire : entendre et écouter les oppositions pour construire un budget raisonnable et réfléchi. »
« Il a entre ses mains, à partir de maintenant, la stabilité de nos institutions, de la vie économique et démocratique. Nous avons été très clairs : il n’y aura pas de censure a priori. Elle aurait été engagée à l’encontre d’une personnalité issue de la gauche et de l’extrême gauche. », a indiqué, de son côté, Jordan Bardella, président du RN
« Un déni démocratique », selon la gauche
Cependant, les critiques les plus virulentes viennent de la gauche. Manuel Bompard, député de La France insoumise, a fustigé un choix qu’il qualifie de « bras d’honneur contre la démocratie ». Selon lui, « l’orientation politique de Bayrou depuis 2017 montre que son cap politique s’inscrit dans la continuité avec le macronisme ». Il a confirmé que LFI déposerait une motion de censure.
Sandrine Rousseau, députée écologiste, a exprimé son mécontentement sur X : « Les électeurs ont infligé une défaite à Macron, nous avons refusé Barnier… Tout cela pour avoir Bayrou, qui est l’exact mélange des deux. Cela va mal finir. »
Le Parti Socialiste a également exprimé son désaccord, tout en adoptant une posture plus mesurée. « C’est un déni démocratique des élections de juillet », a déclaré un proche de la direction socialiste. Toutefois, le PS ne déposera pas de motion de censure « a priori », à condition que François Bayrou montre des signes d’ouverture sur des sujets prioritaires et renonce à l’usage du 49-3.
Les enjeux pour le nouveau Premier ministre
François Bayrou sera confronté à plusieurs défis majeurs : constituer un gouvernement inclusif capable de fédérer des sensibilités politiques variées, faire adopter un budget pour 2025, essentiel pour stabiliser la situation économique, et restaurer la confiance dans les institutions dans un contexte de crise de gouvernance profonde.
Lui-même adepte des gouvernements de coalition, François Bayrou pourrait tirer parti de cette approche pour bâtir des majorités de projet. Cependant, le défi est immense, comme l’ont rappelé ses opposants.
Une mission d’équilibriste pour Emmanuel Macron et François Bayrou
En choisissant François Bayrou, Emmanuel Macron mise sur un homme de dialogue, capable de faire face à l’impasse politique actuelle. « Le président de la République a nommé François Bayrou Premier ministre. Dans le moment si difficile que traverse notre pays, je sais qu’il a les qualités pour défendre l’intérêt général et construire l’indispensable stabilité que les Français attendent », a écrit Gabriel Attal.
François Bayrou semble conscient de la gravité de la situation. « Quand vous faites un chemin et que vous savez où vous allez, il n’y a pas une minute de perdue », a-t-il affirmé, soulignant sa volonté de rassembler les Français.