- Reconduit par Emmanuel Macron à la tête du gouvernement, Sébastien Lecornu entame un nouveau mandat sous haute tension politique.
- Entre soutiens appuyés dans la majorité et offensive coordonnée des oppositions, l’Assemblée nationale s’apprête à vivre une séquence décisive.
La confirmation de Sébastien Lecornu à Matignon a déclenché une salve de prises de position : félicitations dans le camp présidentiel, défiance à gauche, hostilité à l’extrême droite, tandis que le Parti socialiste conditionne son vote à une suspension « immédiate et complète » de la réforme des retraites. À la clé, la menace d’une motion de censure dès la déclaration de politique générale.
Dans son camp, les soutiens se sont multipliés. L’ex-ministre de l’Éducation nationale, Élisabeth Borne, a « réitéré ses vœux de succès face aux défis majeurs du pays ». Catherine Vautrin, ex-ministre du Travail, a assuré que le Premier ministre avait « toute [sa] confiance pour répondre aux attentes de nos compatriotes et retrouver la stabilité dont notre pays a tant besoin ».
Côté droite gouvernementale, Philippe Tabarot, ministre des Transports démissionnaire (LR), a salué une reconduction « seul choix possible ».
À l’Assemblée, sa présidente Yaël Braun-Pivet a « pris acte de la reconduction de Sébastien Lecornu à Matignon », rappelant que « depuis déjà des semaines, l’Assemblée nationale est en ordre de marche, prête à jouer pleinement son rôle : débattre, contrôler, voter. Place au travail. Il est temps ! »
Chez Horizons, le porte-parole Xavier Albertini a apporté le « soutien » du parti « avec la possibilité de discuter sur un certain nombre de sujets », ajoutant : « Il est nécessaire de trouver des logiques de compromis. »
À gauche : stupeur, colère et annonce d’une censure
Les réactions à gauche ont été nettement plus critiques. Marine Tondelier, secrétaire nationale des Écologistes, a lâché un « incroyable » sur X avant de dénoncer « un pays au bord de la crise de nerf » sur LCI.
Mathilde Panot, présidente du groupe LFI, a estimé que « jamais un président n’aura voulu autant gouverner par le dégoût et la colère. Lecornu, démissionné lundi, est de nouveau nommé par Macron vendredi ».
Selon elle, « Macron repousse misérablement l’inévitable : son départ », annonçant le dépôt d’une nouvelle motion de censure « immédiate » et d’une motion de destitution du président.
Le coordinateur national de LFI Manuel Bompard a fustigé sur X la « tour d’ivoire » d’Emmanuel Macron et « un nouveau bras d’honneur aux Français ». Jean-Luc Mélenchon a ironisé sur « chaque tour du manège » où « le pompon reste au même endroit ».
Au PCF, Fabien Roussel a condamné un « choix inacceptable. Encore », jugeant Emmanuel Macron « complètement coupé du peuple ».
Le Parti socialiste, pivot de la majorité de circonstance
Clé de voûte potentielle, le PS a haussé le ton. Son secrétaire général Pierre Jouvet a assuré que le Parti socialiste n’avait « aucun deal » avec Sébastien Lecornu sur une non-censure, ni « aucune assurance, ni garantie ».
« Nous rappelons de manière très claire ce soir au Premier ministre que s’il n’y a pas dès sa déclaration de politique générale la confirmation de l’abandon du 49-3, des mesures pour protéger et renforcer le pouvoir d’achat des Français et une suspension immédiate et complète de la réforme des retraites, nous le censurerons », prévient-il.
Droite et extrême droite : distance prudente et promesse de censure
Chez Les Républicains, le ministre de l’Intérieur démissionnaire Bruno Retailleau ne participera pas au gouvernement « Lecornu 2 ». Le parti n’aurait pas acté de refus de principe si d’autres personnalités souhaitaient y prendre part. Une réunion des parlementaires LR devait se tenir samedi matin à 8h30, suivie d’un bureau politique à 11h.
À l’extrême droite, Éric Ciotti, président de l’Union des droites pour la République (UDR), a simplement écrit « censure » sur X.Jordan Bardella a assuré que le Rassemblement national censurerait « immédiatement » cet « attelage sans aucun avenir, dont l’unique raison d’être est la peur de la dissolution, c’est-à-dire du peuple ».
Le président du RN estime encore que « le gouvernement Lecornu II, nommé par un Emmanuel Macron plus que jamais isolé et déconnecté à l’Élysée, est une mauvaise plaisanterie, une honte démocratique et une humiliation pour les Français ».
« Les manœuvres continuent, la censure, par conséquent, s’impose et la dissolution est plus que jamais incontournable »,renchérit Marine Le Pen
Entre soutien de la majorité, conditions strictes du PS et fermeté de LFI et du RN, l’exécutif s’avance vers une déclaration de politique générale à haut risque. Les lignes rouges sont tracées : abandon du 49.3, mesures immédiates pour le pouvoir d’achat et suspension complète de la réforme des retraites.
Dans ce contexte, chaque vote comptera. Le gouvernement Lecornu II joue sa survie sur sa capacité à construire, texte par texte, une majorité de circonstance.
