- Deux jours après la présentation du projet de loi de finances, Standard & Poor’s a rétrogradé la note souveraine de la France de “AA-” à “A+”, pointant une incertitude toujours “élevée” sur les finances publiques.
- Le gouvernement “prend acte”, assume un “appel au sérieux” et défend sa trajectoire pour ramener le déficit à 5,4 % du PIB en 2025, puis 4,7 % en 2026.
Vendredi 17 octobre, S&P a abaissé la note de la France à A+, jugeant l’assainissement budgétaire trop lent sans mesures supplémentaires. Roland Lescure “prend acte” et réaffirme l’objectif de 5,4 % en 2025 et 4,7 % en 2026, première marche vers 3 % en 2029.
“C’est un appel à la lucidité, à la responsabilité. C’est un appel au sérieux”, insiste le ministre, qui appelle à voter le budget avant la fin de l’année.
Une rétrogradation en pleine séquence budgétaire
La décision de Standard & Poor’s intervient alors que le Premier ministre Sébastien Lecornu vient de dévoiler un projet de loi de finances qui vise une réduction graduelle du déficit public. Dans un communiqué, le ministre de l’Économie et des Finances Roland Lescure assure que “le gouvernement confirme sa détermination à tenir l’objectif de déficit de 5,4 % du PIB pour 2025”, écrit-il, tout en ambitionnant d’“accélérer la réduction du déficit public à 4,7 % du PIB tout en préservant la croissance” en 2026.
“Il s’agit d’une étape clef qui nous permettra de respecter l’engagement de la France à ramener le déficit public sous 3 % du PIB en 2029”, ajoute-t-il, appelant à la “responsabilité collective” du gouvernement et du Parlement pour adopter un budget “avant la fin de l’année”.
Ce que dit S&P : une consolidation jugée trop lente
Dans son avis, S&P estime que l’objectif de déficit de 5,4 % du PIB en 2025 sera atteint. Mais l’agence prévient : “en l’absence de mesures supplémentaires significatives de réduction du déficit budgétaire, l’assainissement budgétaire sur [son] horizon de prévision sera plus lent que prévu.” Elle anticipe par ailleurs que la dette publique brute atteindra 121 % du PIB en 2028, contre 112 % fin de l’année dernière.
L’enjeu est celui de la crédibilité : une trajectoire lisible, adossée à des mesures votées et exécutées, demeure la condition pour convaincre les investisseurs et stabiliser la charge d’intérêt.
Roland Lescure : “un appel au sérieux”
Invité de franceinfo le samedi 18 octobre, Roland Lescure a assumé le diagnostic : “C’est un appel à la lucidité, à la responsabilité. C’est un appel au sérieux.”
“On met en place un budget qui va nous permettre d’y être, mais ce budget, il faut qu’il soit voté, et ça, c’est un élément très important”, affirme t-il.
Le ministre a replacé cette étape dans une trajectoire pluriannuelle : “L’objectif de 4,7 % de déficit en 2026, c’est une première marche, l’objectif absolu, c’est 3 % du PIB en 2029, ça va nous permettre de stabiliser la dette.” Et de prévenir : “Ça va demander des efforts, c’est ce que nous dit l’agence Standard and Poor’s aujourd’hui, donc il faut qu’on vote le budget.”Conscient d’une conjoncture plus heurtée, il lâche aussi : “Nous ne pouvons pas ignorer ce nuage qui s’ajoute à un bulletin météo qui est déjà assez gris.”
“C’est vraiment à nous, à la fois le gouvernement et le Parlement, de convaincre les observateurs pour continuer à rassurer les investisseurs et les agences de notation”, a-t-il ajouté
Les marchés à l’affût : pourquoi le vote du budget est décisif
La crédibilité d’une trajectoire budgétaire se joue d’abord au Parlement. L’adoption d’un budget “avant la fin de l’année” est vue par le gouvernement comme la condition sine qua non pour “rassurer les investisseurs” et contenir le coût de financement. En clair, chaque point de visibilité gagné pèse sur la perception du risque pays et peut amortir l’effet d’une dégradation de note.
C’est la deuxième fois en un an et demi que S&P abaisse la note de la France. En septembre, Fitch avait déjà rétrogradé la note souveraine de AA- à A+, citant l’instabilité politique et des incertitudes budgétaires. Le marché attend désormais la décision de Moody’s, prévue le 24 octobre, qui viendra compléter le tableau des trois grandes agences.
