12.6 C
Paris
samedi, novembre 8, 2025
AccueilActualitéTaxe Gafam : l’Assemblée vote le doublement du taux à 6 %...

Taxe Gafam : l’Assemblée vote le doublement du taux à 6 % dans le Budget 2026, Lescure appelle à « la prudence »

Date:

  • Les députés ont adopté, mardi 28 octobre, un amendement qui double la taxe sur les services numériques (TSN) de 3 % à 6 % et relève son seuil d’assujettissement au niveau mondial.
  • Au Palais-Bourbon, le ministre de l’Économie Roland Lescure a exhorté les élus à la prudence face aux menaces de représailles américaines.

    Au cours de l’examen du projet de loi de finances pour 2026, l’Assemblée nationale a adopté un compromis portant la taxe sur les services numériques à 6 % et relevant son seuil mondial à 2 milliards d’euros, afin de cibler les plus grands groupes du secteur — majoritairement américains. Une avancée limitée pour les défenseurs d’une fiscalité numérique musclée, obtenue au terme d’échanges tendus au cours desquels Bercy appelle à la prudence.

Un compromis à 6 % après un premier tour de vis à 15 % en commission

Portée par Jean-René Cazeneuve (Ensemble pour la République), la hausse adoptée en séance revient sur la trajectoire plus dure votée en commission une semaine plus tôt — un taux multiplié par cinq, de 3 % à 15 %. Face aux risques d’escalade commerciale, le rapporteur général a présenté une version amendée : doublement à 6 % et relèvement du seuil d’assujettissement de 750 millions d’euros à 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires mondial.

« Je ne suis pas là pour rouvrir une guerre commerciale entre la France et les États-Unis », a expliqué Jean-René Cazeneuve, dont l’amendement a finalement été adopté.

Bercy met en garde : « Soyez prudents, je vous en conjure »

Au terme d’une heure et demie de débats, Roland Lescure a plaidé pour une montée en charge mesurée. « Soyez prudents, je vous en conjure », a lancé le ministre, rappelant les menaces de représailles de l’administration Trump si la France alourdissait trop la fiscalité des GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft).

Pour illustrer la volatilité de Washington, il a évoqué un épisode récent : « Encore ce week-end, le président américain a annoncé une hausse unilatérale de 10 % des droits de douane sur le Canada après la diffusion d’une… publicité qui lui avait déplu. »   

 « Si on introduit une taxe disproportionnée, on aura des représailles disproportionnées », insiste -t-il

Une gauche vent debout contre la « reculade »

À gauche, la décision est loin de faire consensus. Claire Lejeune (La France insoumise) dénonce une forme de capitulation face à Washington : « En quelques jours, nous voyons une reculade de Jean-René Cazeneuve, sous la menace de potentielles représailles au niveau américain. »

Dans le même registre, Emmanuel Maurel (Gauche démocrate et républicaine) fustige une Europe trop conciliante, estimant que « la peur des représailles, c’est précisément ce qui a justifié l’accord honteux entre Madame von der Leyen et Donald Trump».

La présidente du groupe Écologiste et social, Cyrielle Chatelain, s’insurge, allant jusqu’à dénoncer une pression extérieure manifeste :

« Je suis extrêmement gênée de voir le nombre de députés qui retirent leur amendement, sous caution de pression faite par des instances étrangères. (…) Cela veut dire qu’on ne peut plus légiférer sous les menaces de Trump. »

La droite redoute des sanctions sur les exportations françaises

Sur les bancs de droite, l’hostilité aux surtaxes persiste. Valérie Bazin-Malgras (Droite républicaine) justifie le refus d’aller plus loin : « On veut préserver les filières vins et spiritueux, qui sont nos fleurons », craignant un durcissement des droits de douane américains sur ces secteurs clés.

Créée en 2019, la TSN vise les recettes tirées de la publicité ciblée, de la vente de données personnelles à des fins publicitaires et des plateformes d’intermédiation. Son rendement est attendu autour de 800 millions d’euros en 2025. Le relèvement du seuil mondial à 2 milliards d’euros resserre le ciblage sur les géants du secteur, principalement américains, tout en évitant que des acteurs plus petits ne soient happés par le dispositif.

 Pour entrer en vigueur, le doublement du taux doit figurer dans la loi de finances 2026 définitivement adoptée. Roland Lescure a, dans la foulée du vote, replacé l’enjeu sur le terrain de l’attractivité et du droit international.

Selon lui, « En votant ensemble une taxe sur les multinationales, le RN et la LFI s’allient contre l’attractivité de la France et, in fine, pour détruire des emplois ». Sous couvert de justice fiscale, le ministre de l’Économie estime que ces formations soutiennent désormais des mesures qui « isolent la France, l’excluent de ses engagements internationaux et l’exposent à une fuite des sièges sociaux ».

 Roland Lescure regrette ainsi que « la justice fiscale a laissé place à la surenchère fiscale », dénonçant une disposition qui serait à ses yeux inopérante et impossible à appliquer. Il souligne en outre son incompatibilité avec les 125 conventions fiscales bilatérales que la France a signées, notamment avec ses partenaires économiques les plus importants.

Enfin, il appelle les députés au sens des responsabilités, rappelant que la renonciation au 49.3 impose une vigilance accrue « vote après vote ».

Les plus populaires

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici