- Les règles du découvert bancaire évoluent et font grincer des dents.
- Entre protection des ménages et craintes d’un accès plus restreint à la trésorerie, le débat s’enflamme.
Une disposition européenne va obliger les banques à examiner de plus près la situation financière de leurs clients avant d’accorder un découvert inférieur à 200 euros et d’une durée de moins d’un mois, sous peine de pénalités. Le ministre de l’Économie, Roland Lescure, assure que le découvert « ni interdit, ni automatique » le restera, promet la fin des frais fixes et convoque banques et associations à Bercy pour « lever tous les doutes ».
Ce que prévoit le texte européen
Adoptée au niveau européen puis transposée par ordonnance le 3 septembre, la réforme assimile facilités de caisse et découverts autorisés à des crédits à la consommation. Concrètement, avant d’accorder un petit découvert, les établissements devront analyser revenus, charges, loyer et éventuels incidents de crédit. À défaut, ils s’exposent à des pénalités.
Cette requalification n’est pas anodine : les découverts entreront dans le calcul de l’endettement. Autrement dit, au moment d’un projet immobilier ou d’un prêt à la consommation, un découvert régulier de « quelques centaines d’euros » pourra peser dans la décision.
Une mesure qui inquiète des ménages déjà fragilisés
Sur le papier, l’objectif est de lutter contre le surendettement. Mais l’effet de bord pourrait être une restriction d’accès à un outil de trésorerie du quotidien. D’après une enquête MoneyVox, plus d’un tiers des Français ont été à découvert au moins une fois ces douze derniers mois, et un quart chaque mois. Nombreux sont ceux qui pourraient se voir opposer davantage de refus ou faire face à des démarches plus lourdes.
« Ni interdits, ni automatiques » : la mise au point de Roland Lescure
Invité sur BFMTV et RMC lundi 3 novembre, Roland Lescure a martelé que la réforme ne signe pas la fin du découvert.
« Avant ce texte, les découverts n’étaient ni interdits, ni automatiques. Après ce texte, ils ne seront ni interdits, ni automatiques », affirme -t-il.
Le ministre reconnaît l’utilité sociale du découvert : « Certains Français en ont besoin, la machine à laver tombe en panne, faut la remplacer, ça c’est normal. »
Et de fustiger l’emballement autour de la réforme : « C’est n’importe quoi, depuis trois jours, c’est fake news après fake news. »
Il pointe notamment une pétition lancée par LFI, rappelant que certains signataires opposés, dont la députée Manon Aubry, ont pourtant voté le texte. Sur les critiques de complexité, il tranche : « Quand un texte assez clair est mal lu, c’est qu’il y a quand même un peu de mauvaise foi au passage. »
Réunion à Bercy : rassurer, clarifier, simplifier
Pour lever tous les doutes, une réunion se tient mardi 4 novembre à Bercy, avec les banques et les associations de consommateurs. Objectif : rassurer sur le maintien du découvert et simplifier au maximum les évaluations que les banques devront mener, afin d’éviter des procédures trop lourdes pour les clients. La directive doit être pleinement appliquée d’ici novembre 2026.
« Les découverts ne sont pas interdits, ils seront autorisés une fois pour toutes, que ce soit en dessous de 200 euros ou au-dessus de 200 euros. Ce sera, évidemment, un examen des conditions financières du ménage. C’est normal, on est là pour protéger les gens, de manière qu’on évite les découverts excessifs », précise le ministre de l’Économie.
Frais de découvert : la fin annoncée des forfaits
Selon le ministre, la suppression de des frais fixes permettra de soulager les incidents ponctuels et de faible montant, jusqu’ici surtaxés. « Aujourd’hui, vous avez deux euros de découvert, vous pouvez payer cinq euros de frais. Ce sera terminé ! Ce qu’on appelle les frais fixes, forfaitaires, c’est terminé. C’est peut-être pour ça que les banques ne sont pas peut-être pas toutes contentes de ce qu’on fait », explique Roland Lescure
Ce qui ne change pas… et ce qui pourrait changer pour l’accès au crédit
- Au-delà de 200 € : rien ne bouge. Une autorisation préalable reste nécessaire, comme aujourd’hui.
- Effet sur l’endettement : l’intégration des découverts au calcul de la charge mensuelle pourra resserrer l’accès au crédit, notamment immobilier, pour les emprunteurs déjà proches des seuils
